il frola le Torero.
La seconde d'apres, les spectateurs haletants virent don Cesar qui,
la cape jetee sur les reins, se retirait avec autant d'aisance et de
tranquillite qu'il eut pu en montrer dans son interieur paisible.
Un tonnerre d'acclamations salua ce coup d'audace execute avec un
sang-froid et une maitrise incomparables. Meme les courtisans oublierent
tout pour applaudir. Le roi, d'ailleurs, n'avait pu dissimuler un geste
emerveille.
Le taureau, stupefait de n'avoir frappe que le vide, se rua de nouveau
sur l'homme. Celui-ci s'enroula dans sa cape en la tenant par les
extremites du collet, et, tournant le dos a la bete, il se mit a marcher
paisiblement devant elle.
La bete frappa furieusement a droite. Elle ne rencontra que l'etoffe.
Elle retourna a la charge et frappa a gauche. Le Torero, par une serie
de balancements du corps, evitait les coups et lui presentait toujours
l'etoffe. Puis il se mit a decrire des demi-cercles, et le taureau
suivit la tangente de ces demi-cercles sans jamais pouvoir toucher autre
chose que ce leurre qu'on lui presentait.
Et les acclamations se firent delirantes.
Que les amateurs de courses modernes ne sourient pas d'un air dedaigneux
et ne murmurent pas! Mais ce Torero prodigieux n'accomplit, en somme,
que les exploits que le dernier des capeadores execute sans sourciller
aujourd'hui.
Qu'on veuille bien se souvenir que ceci se passait quelque chose comme
trois siecles avant que ne fussent creees et mises en pratique les
regles de la tauromachie moderne.
Quoi qu'il en soit, les passes de notre Torero, inconnues a l'epoque,
retrouvees plusieurs siecles plus tard, avaient tout le charme de la
nouveaute et pouvaient, a juste raison, susciter l'enthousiasme de la
foule.
Le taureau, surpris de voir qu'aucun de ses coups ne portait, s'arreta
un moment et parut reflechir. Puis il pointa ses oreilles, gratta
rageusement la terre, frola le sol de son mufle et recula pour prendre
son elan.
Le Torero deploya sa cape toute grande, un peu en avant et en dehors de
la ligne de son corps. En meme temps, il vint se placer droit devant le
taureau, le plus pres possible, et, avancant un pied, il provoqua la
bete.
Au moment ou le taureau, apres avoir vise en baissant la tete, se
disposait a porter son coup, il baissa brusquement la cape, en lui
faisant decrire un arc de cercle. En meme temps, il se mettait hors
d'atteinte en lui livrant un passage, par une simple flexion du b
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