me, Bussi-Leclerc glissa prestement son epee sous la lame de
Pardaillan comme pour la soutenir, et, d'un geste sec et violent, il
redressa son epee de toute sa force.
Alors, Fausta, stupefaite, les officiers et les soldats, emerveilles,
virent ceci:
La lame de Pardaillan, arrachee, frappee par une force irresistible,
suivit l'impulsion que lui donnait l'epee de Bussi, s'eleva dans les
airs, decrivit une large parabole et alla tomber dans la piste.
--Desarme! rugit Bussi-Leclerc. Nous sommes quittes.
Au meme instant, fidele a la promesse faite a Fausta de le laisser
vivant pour le bourreau, il se fendit a fond, visant la main de
Pardaillan, voulant avoir la gloire de le toucher, porta son coup et,
comme s'il eut craint que, meme desarme, il ne revint sur lui, il fit un
bond en arriere et se mit hors de sa portee.
Il rayonnait, il exultait, le brave spadassin. Il triomphait sur toute
la ligne. La, devant ces centaines de gentilshommes et de soldats,
spectateurs attentifs de cet etrange duel, il avait eu la gloire de
desarmer et de toucher l'invincible Pardaillan.
Nous avons dit a dessein que la lame de Pardaillan etait allee tomber
sur la piste.
En effet, on se tromperait etrangement si on croyait sur parole
Bussi-Leclerc criant qu'il a desarme son Adversaire.
La lame avait saute, la lame, prealablement limee, habilement maquillee,
mais la poignee etait restee dans la main du chevalier.
En resume, Bussi-Leclerc n'avait nullement desarme son adversaire et la
piteuse comedie qu'il venait de jouer etait de l'invention de Centurion,
qui avait vu la le moyen d'obtenir de Bussi ce que Fausta l'avait charge
de lui demander, et de se venger en meme temps par une humiliation
publique de celui qui l'avait corrige vertement en public.
Bussi-Leclerc pouvait triompher a son aise, car, de loin, on ne pouvait
voir la poignee restee dans la main crispee de Pardaillan, et, comme
tout le monde, en revanche, avait pu voir voler la lame, pour la plupart
des spectateurs le doute n'etait pas possible: l'invincible, le terrible
Francais avait trouve son maitre.
Pour completer la victoire de Bussi-Leclerc, il se trouva que son epee,
alors qu'il s'etait fendu sur son adversaire desarme par un coup de
traitrise, son epee avait erafle un doigt assez serieusement pour que
quelques gouttes de sang jaillissent et vinssent tacher de pourpre la
main de Pardaillan.
Ce n'etait qu'une piqure insignifiante. Mais, de loin, ce sang
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