r le secret, ou
plutot la patience d'habituer a l'exercice le plus familier ces souris
blanches, dont l'espece est rare, et qui semble etre douee d'une
intelligence remarquable. Elle lui apprit qu'on instruit ces jolis
petits animaux au point de les faire obeir au commandement; qu'il en
est qui dansent sur la corde tendue; que d'autres jouent du tambour de
basque; que celles-ci font une partie des evolutions militaires, que
celles-la mettent le feu a un petit canon, dont l'explosion ne leur
cause aucune frayeur.... "Tu le vois, chere enfant, dit a Laure madame
de Melval, il n'est rien que ne surmontent l'habitude et l'education,
meme chez les animaux les plus delicats; et tu m'avoueras que lorsqu'une
petite souris a l'adresse de faire la morte, de danser sur la corde,
et surtout a le courage d'entendre, sans broncher, la detonation de la
poudre a canon, nous sommes veritablement indignes de cette suprematie
que le Createur nous a donnee sur tous les animaux, et tout-a-fait
denues de cette supreme intelligence dont nous sommes si fiers, lorsque,
par une faiblesse ridicule, par une frayeur pusillanime, nous nous
placons au-dessous de ces memes animaux sur lesquels nous devrions
regner."
Laure, convaincue de ces verites frappantes, s'arma de courage et de
resignation. On ne la vit plus frissonner et changer de couleur en
apercevant une araignee traverser sa chambre, et meme grimper sur sa
robe. Les papillons de nuit qui venaient le soir voltiger autour de la
lampe, et les souris qu'elle rencontrait, bien qu'elles n'eussent ni la
blancheur ni l'education de Zizi, ne lui firent plus pousser des cris
effrayants, appeler a son secours. En un mot, elle s'habitua a voir de
sang-froid les insectes les plus hideux; et, sans s'exposer imprudemment
aux atteintes des animaux malfaisants, elle supporta leur vue, leur
approche, et ne tarda pas a se convaincre que presque toujours la peur
qu'on ressent nous fait seule beaucoup plus de mal que n'en pourrait
faire l'objet meme qui la cause.
LE COMITE DES BERGERES.
C'est une erreur de croire qu'a la campagne on peut se livrer impunement
a toutes les extravagances de son esprit, a toutes les imperfections de
son caractere. A la ville, on est plus circonspect; on craint d'etre
observe par des personnes dont on ambitionne le suffrage, et qui
remarqueraient nos defauts; mais, aux champs, plus d'etiquette, plus
de contrainte: on n'a nul interet a plaire a des laboureurs, a des
vi
|