re, les prisonniers courent
le risque d'etre pendus.
-- Peste, dit Mousqueton, je crois que j'aime encore mieux le
siege de La Rochelle.
Quant a Porthos, apres avoir fait tuer un chevreuil a son hote,
apres l'avoir conduit de ses bois a sa montagne, de sa montagne a
ses etangs, apres lui avoir fait voir ses levriers, sa meute,
Gredinet, tout ce qu'il possedait enfin, et fait refaire trois
autres repas des plus somptueux, il demanda ses instructions
definitives a d'Artagnan, force de le quitter pour continuer son
chemin.
-- Voici, cher ami! lui dit le messager; il me faut quatre jours
pour aller d'ici a Blois, un jour pour y rester, trois ou quatre
jours pour retourner a Paris. Partez donc dans une semaine avec
vos equipages; vous descendrez rue Tiquetonne, a l'hotel de la
Chevrette, et vous attendrez mon retour.
-- C'est convenu, dit Porthos.
-- Moi je vais faire un tour sans espoir chez Athos, dit
d'Artagnan; mais, quoique je le croie devenu fort incapable, il
faut observer les procedes avec ses amis.
-- Si j'allais avec vous, dit Porthos, cela me distrairait peut-
etre.
-- C'est possible, dit d'Artagnan, et moi aussi; mais vous
n'auriez plus le temps de faire vos preparatifs.
-- C'est vrai, dit Porthos. Partez donc, et bon courage; quant a
moi, je suis plein d'ardeur.
-- A merveille! dit d'Artagnan.
Et ils se separerent sur les limites de la terre de Pierrefonds,
jusqu'aux extremites de laquelle Porthos voulut conduire son ami.
-- Au moins, disait d'Artagnan tout en prenant la route de
Villers-Cotterets, au moins je ne serai pas seul. Ce diable de
Porthos est encore d'une vigueur superbe. Si Athos vient, eh bien!
nous serons trois a nous moquer d'Aramis, de ce petit frocard a
bonnes fortunes.
A Villers-Cotterets il ecrivit au cardinal.
"Monseigneur, j'en ai deja un a offrir a Votre Eminence, et celui-
la vaut vingt hommes. Je pars pour Blois, le comte de La Fere
habitant le chateau de Bragelonne aux environs de cette ville."
Et sur ce il prit la route de Blois tout en devisant avec
Planchet, qui lui etait une grande distraction pendant ce long
voyage.
XV. Deux tetes d'ange
Il s'agissait d'une longue route; mais d'Artagnan ne s'en
inquietait point: il savait que ses chevaux s'etaient rafraichis
aux plantureux rateliers du seigneur de Bracieux. Il se lanca donc
avec confiance dans les quatre ou cinq journees de marche qu'il
avait a faire suivi du fidele Planchet.
Comme nous
|