monde
connu?
Pistache, cette fois, fit le tour de la chambre, mais ne s'arreta
a personne, et, s'en allant a la porte, il se mit a gratter et a
se plaindre.
-- Voyez, messieurs, dit le prince, cet interessant animal ne
trouvant pas ici ce que je lui demande, va chercher dehors. Mais,
soyez tranquilles, vous ne serez pas prives de sa reponse pour
cela. Pistache, mon ami, continua le duc, venez ici. Le chien
obeit. Le plus grand voleur du monde connu, reprit le prince, est-
ce M. le secretaire du roi Le Camus, qui est venu a Paris avec
vingt livres et qui possede maintenant dix millions?
Le chien secoua la tete en signe de negation.
-- Est-ce, continua le prince, M. le surintendant d'Emery, qui a
donne a M. Thore, son fils, en le mariant, trois cent mille livres
de rente et un hotel pres duquel les Tuileries sont une masure et
le Louvre une bicoque?
Le chien secoua la tete en signe de negation.
-- Ce n'est pas encore lui, reprit le prince. Voyons, cherchons
bien: serait-ce, par hasard, l'illustrissime _facchino_ Mazarini
di Piscina, hein?
Le chien fit desesperement signe que oui en se levant et en
baissant la tete huit ou dix fois de suite.
-- Messieurs, vous le voyez, dit M. de Beaufort aux assistants,
qui cette fois n'oserent pas meme rire du bout des dents,
l'illustrissime _facchino_ Mazarini di Piscina est le plus grand
voleur du monde connu; c'est Pistache qui le dit, du moins.
Passons a un autre exercice.
-- Messieurs, continua le duc de Beaufort, profitant d'un grand
silence qui se faisait pour produire le programme de la troisieme
partie de la soiree, vous vous rappelez tous que M. le duc de
Guise avait appris a tous les chiens de Paris a sauter pour
mademoiselle de Pons, qu'il avait proclamee la belle des belles!
eh bien, messieurs, ce n'etait rien, car ces animaux obeissaient
machinalement, ne sachant point faire de dissidence
(M. de Beaufort voulait dire difference) entre ceux pour lesquels
ils devaient sauter et ceux pour lesquels ils ne le devaient pas.
Pistache va vous montrer ainsi qu'a monsieur le gouverneur qu'il
est fort au-dessus de ses confreres. Monsieur de Chavigny, ayez la
bonte de me preter votre canne.
M. de Chavigny preta sa canne a M. de Beaufort.
M. de Beaufort la placa horizontalement a la hauteur d'un pied.
-- Pistache, mon ami, dit-il, faites-moi le plaisir de sauter pour
madame de Montbazon.
Tout le monde se mit a rire: on savait qu'au moment ou il avait
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