arla d'abord d'un manuscrit qu'il voulait lui dedier, et Pichegru ayant
en quelque sorte provoque ses confidences, il finit par s'expliquer.
Pichegru lui demanda une lettre du prince de Conde lui-meme, pour savoir
a qui il avait affaire. Fauche-Borel retourna aupres de M. de
Montgaillard, celui-ci aupres du prince. Il fallut passer une nuit
entiere pour faire ecrire au prince une lettre de huit lignes. Tantot il
ne voulait pas qualifier Pichegru de general, car il craignait de
reconnaitre la republique; tantot il ne voulait pas mettre ses armes
sur l'enveloppe. Enfin la lettre ecrite, Fauche-Borel retourna aupres de
Pichegru, qui, ayant vu l'ecriture du prince, entra aussitot en
pourparlers. On lui offrait, pour lui, le grade de marechal, le
gouvernement de l'Alsace, un million en argent, le chateau et le parc de
Chambord en propriete, avec douze pieces de canon prises sur les
Autrichiens, une pension de 200,000 francs de rente, reversible a sa
femme et a ses enfans. On lui offrait, pour son armee, la conservation
de tous les grades, une pension pour les commandans de place qui se
rendraient, et l'exemption d'impot, pendant quinze ans, pour les villes
qui ouvriraient leurs portes. Mais on demandait que Pichegru arborat le
drapeau blanc, qu'il livrat la place d'Huningue au prince de Conde, et
qu'il marchat avec lui sur Paris. Pichegru etait trop fin pour
accueillir de pareilles propositions. Il ne voulait pas livrer Huningue
et arborer le drapeau blanc dans son armee: c'etait beaucoup trop
s'engager et se compromettre. Il demandait qu'on lui laissat passer le
Rhin avec un corps d'elite; la il promettait d'arborer le drapeau blanc;
de prendre avec lui le corps de Conde, et de marcher ensuite sur Paris.
On ne voit pas ce que son projet pouvait y gagner; car il etait aussi
difficile de seduire l'armee au-dela qu'en-deca du Rhin; mais il ne
courait pas le danger de livrer une place, d'etre surpris en la
livrant, et de n'avoir aucune excuse a donner a sa trahison. Au
contraire, en se transportant au-dela du Rhin, il etait encore maitre de
ne pas consommer la trahison, s'il ne s'entendait pas avec le prince et
les Autrichiens; ou, s'il etait decouvert trop tot, il pouvait profiter
du passage obtenu pour executer les operations que lui commandait son
gouvernement, et dire ensuite qu'il n'avait ecoute les propositions de
l'ennemi que pour en profiter contre lui. Dans l'un et l'autre cas, il
se reservait le moyen de trahir ou la re
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