ent les emigres qui auraient concouru a cette
expedition, des Francais qui avons eu recours a la guerre civile, mais
en France, et sans meler des etrangers dans nos rangs." C'etait meme,
disaient les partisans de ce projet, le seul moyen pour les emigres de
rentrer en France, soit par la contre-revolution, soit par une
amnistie.
Le gouvernement anglais, qui avait pris le corps de Conde a sa solde, et
qui desirait fort une diversion vers l'Est, tandis qu'il opererait par
l'Ouest, insistait pour que le prince de Conde fit une tentative,
n'importe laquelle. Il lui faisait promettre, par son ambassadeur en
Suisse, Wickam, des secours en argent, et les moyens necessaires pour
former de nouveaux regimens. Le prince intrepide ne demandait pas mieux
que d'avoir une entreprise a tenter; il etait tout a fait incapable de
diriger une affaire, ou une bataille, mais il etait pret a marcher tete
baissee sur le danger, des qu'on le lui aurait indique.
On lui suggera l'idee de faire une tentative de seduction aupres de
Pichegru, qui commandait l'armee du Rhin. Le terrible comite de salut
public n'effrayait plus les generaux, et n'avait plus l'oeil ouvert et
la main levee sur eux: la republique, payant ses officiers en assignats,
leur donnait a peine de quoi satisfaire a leurs besoins les plus
pressans: les desordres eleves dans son sein mettaient son existence en
doute, et alarmaient les ambitieux qui craignaient de perdre par sa
chute les hautes dignites qu'ils avaient acquises. On savait que
Pichegru aimait les femmes et la debauche; que les 4,000 francs qu'il
recevait par mois, en assignats, valant a peine 200 francs sur la
frontiere, ne pouvaient lui suffire, et qu'il etait degoute de servir un
gouvernement chancelant. On se souvenait qu'en germinal il avait prete
main-forte contre les patriotes, aux Champs-Elysees. Toutes ces
circonstances firent penser que Pichegru serait peut-etre accessible a
des offres brillantes. En consequence, le prince s'adressa pour
l'execution de ce projet a M. de Montgaillard, et celui-ci a un libraire
de Neuchatel, M. Fauche-Borel, qui, sujet d'une republique sage et
heureuse, allait se faire le serviteur obscur d'une dynastie sous
laquelle il n'etait pas ne. Ce M. Fauche-Borel se rendit a Altkirch, ou
etait le quartier-general de Pichegru. Apres l'avoir suivi dans
plusieurs revues, il finit par attirer son attention a force de
s'attacher a ses pas; enfin il osa l'aborder dans un corridor: il lui
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