once qu'Henriot est sur la place du Carrousel, qu'il a
egare les canonniers, qu'il a fait tourner les canons contre la salle de la
convention, et qu'il va commencer l'attaque. Collot-d'Herbois se place
alors au fauteuil, qui, par la disposition de la salle, devait recevoir les
premiers boulets, et dit en s'asseyant: "Representans, voici le moment de
mourir a notre poste. Des scelerats ont envahi le Palais-National." A ces
mots, tous les deputes, dont les uns etaient debout, dont les autres
erraient dans la salle, reprennent leurs places, et demeurent assis dans un
silence majestueux. Tous les citoyens des tribunes s'enfuient avec un bruit
epouvantable, et ne laissent apres eux qu'un nuage de poussiere. La
convention reste abandonnee, et convaincue qu'elle va etre egorgee, mais
resolue a perir plutot que de souffrir un Cromwell. Admirons ici l'empire
de l'occasion sur les courages! Ces memes hommes si long-temps soumis au
rheteur qui les haranguait, bravent aujourd'hui les canons qu'il a fait
diriger contre eux, avec une sublime resignation. Des membres de
l'assemblee entrent et sortent, et apportent des nouvelles de ce qui se
passe au Carrousel. Henriot y donne toujours des ordres. "Hors la loi, hors
la loi le brigand!" s'ecrie-t-on dans la salle. On rend aussitot le decret
de mise hors la loi, et des deputes vont le publier devant le
Palais-National.
Dans ce moment, Henriot, qui avait egare les canonniers, et avait fait
tourner les pieces contre la salle, voulait les engager a tirer. Il ordonne
le feu, mais ceux-ci hesitent. Des deputes s'ecrient: "Canonniers, vous
deshonorerez-vous? ce brigand est hors la loi!" Les canonniers alors
refusent positivement d'obeir a Henriot. Abandonne des siens, il n'a que le
temps de tourner bride, et de s'enfuir a la commune.
Ce premier danger passe, la convention met hors la loi les deputes qui se
sont soustraits a ses decrets, et tous les membres de la commune qui sont
en revolte. Cependant, ce n'etait pas tout. Si Henriot n'etait plus a la
place du Carrousel, les revoltes etaient encore a la commune avec toutes
leurs forces, et avaient encore la ressource d'un coup de main. Il fallait
obvier a ce grand peril. On deliberait sans agir. Dans la petite salle
situee derriere le bureau ou se trouvaient les comites et beaucoup de
representans, on proposa de nommer un commandant de la force armee, pris
dans le sein de l'assemblee. "Qui? demande-t-on.--Barras, repond une voix,
et il aura l
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