esses deja raffinees,
d'inventions gentilles et polissonnes. Tous leurs regards signifiaient
quelque chose d'impur, et tous leurs gestes leur rappelaient la chaude
intimite des nuits.
Maintenant, sans se l'avouer, sans le comprendre encore peut-etre, ils
commencaient a se lasser l'un de l'autre. Ils s'aimaient bien, pourtant;
mais ils n'avaient plus rien a se reveler, plus rien a faire qu'ils
n'eussent fait souvent, plus rien a apprendre l'un par l'autre, pas meme
un mot d'amour nouveau, un elan imprevu, une intonation qui fit plus
brulant le verbe connu, si souvent repete.
Ils s'efforcaient, cependant, de rallumer la flamme affaiblie des
premieres etreintes. Ils imaginaient, chaque jour, des ruses tendres,
des gamineries naives ou compliquees, toute une suite de tentatives
desesperees pour faire renaitre dans leurs coeurs l'ardeur inapaisable
des premiers jours, et dans leurs veines la flamme du mois nuptial.
De temps en temps, a force de fouetter leur desir, ils retrouvaient une
heure d'affolement factice que suivait aussitot une lassitude degoutee.
Ils avaient essaye des clairs de lune, des promenades sous les feuilles
dans la douceur des soirs, de la poesie des berges baignees de brume, de
l'excitation des fetes publiques.
Or, un matin, Henriette dit a Paul:
--Veux-tu m'emmener diner au cabaret?
--Mais oui, ma cherie.
--Dans un cabaret tres connu.
--Mais oui.
Il la regardait, l'interrogeant de l'oeil, voyant bien qu'elle pensait a
quelque chose qu'elle ne voulait pas dire.
Elle reprit:
--Tu sais, dans un cabaret... comment expliquer ca?... dans un cabaret
galant... dans un cabaret ou on se donne des rendez-vous?
Il sourit:--Oui. Je comprends, dans un cabinet particulier d'un grand
cafe?
--C'est ca. Mais d'un grand cafe ou tu sois connu, ou tu aies deja
soupe... non... dine... enfin tu sais... enfin... je voudrais... non, je
n'oserai jamais dire ca?
--Dis-le, ma cherie; entre nous, qu'est-ce que ca fait? Nous n'en sommes
pas aux petits secrets.
--Non, je n'oserai pas.
--Voyons, ne fais pas l'innocente. Dis-le?
--Eh bien... eh bien... je voudrais... je voudrais etre prise pour ta
maitresse... na... et que les garcons, qui ne savent pas que tu es
marie, me regardent comme ta maitresse, et toi aussi... que tu me croies
ta maitresse, une heure, dans cet endroit-la, ou tu dois avoir
des souvenirs... Voila!... Et je croirai moi-meme que je suis ta
maitresse.... Je commettrai une g
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