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ns notre etude juste au moment le plus pathetique de l'histoire de Jean Lapin. En voyant entrer M. Viot toute l'etude tressauta. Les petits, effares, se regarderent. Le narrateur s'arreta court. Jean Lapin, interdit, resta une patte en l'air, en dressant de frayeur ses grandes oreilles. Debout devant ma chaire, le souriant M. Viot promenait un long regard d'etonnement sur les pupitres degarnis. Il ne parlait pas, mais ses clefs s'agitaient d'un air feroce: "Frinc! frinc! frinc! tas de droles, on ne travaille donc plus ici!" J'essayai tout tremblant d'apaiser les terribles clefs. "Ces messieurs ont beaucoup travaille, ces jours-ci, balbutiai-je... J'ai voulu les recompenser en leur racontant une petite histoire." M. Viot ne me repondit pas. Il s'inclina en souriant, fit gronder ses clefs une derniere fois et sortit. Le soir, a la recreation de quatre heures, il vint vers moi, et me remit, toujours souriant, toujours muet, le cahier du reglement ouvert a la page 12: _Devoirs du maitre envers les eleves_. Je compris qu'il ne fallait plus raconter d'histoires et je n'en racontai plus jamais. Pendant quelques jours, mes petits furent inconsolables. Jean Lapin leur manquait; et cela me crevait le coeur de ne pouvoir le leur rendre. Je les aimais tant, si vous saviez, ces gamins-la! Jamais nous ne nous quittions... Le college etait divise en trois quartiers tres distincts: les grands, les moyens, les petits; chaque quartier avait sa cour, son dortoir, son etude. Mes petits etaient donc a moi, bien a moi. Il me semblait que j'avais trente-cinq enfants. A part ceux-la, pas un ami. M. Viot avait beau me sourire, me prendre par le bras aux recreations, me donner des conseils au sujet du reglement, je ne l'aimais pas, je ne pouvais pas l'aimer; ses clefs me faisaient trop peur. Le principal, je ne le voyais jamais. Les professeurs meprisaient le petit Chose et le regardaient du haut de leur toque. Quant a mes collegues, la sympathie que l'homme aux clefs paraissait me temoigner me les avait alienes; d'ailleurs, depuis ma presentation aux sous-officiers, je n'etais plus retourne au cafe Barbette, et ces braves gens ne me le pardonnaient pas. Il n'y avait pas jusqu'au portier Cassagne et au maitre d'armes Roger qui ne fussent pas contre moi. Le maitre d'armes surtout semblait m'en vouloir terriblement. Quand je passais a cote de lui, il frisait sa moustache d'un air feroce et roulait de gros yeux, comme s'il eut vo
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