s donner un conseil...
Il hesita.
-- Oh! donnez! donnez! dit le plus jeune des deux voyageurs,
prenant la parole pour la premiere fois.
-- Eh bien, ce serait de diner tout simplement a table d'hote,
comme fait en ce moment le voyageur qui est attendu par cette
voiture tout attelee; le diner y est excellent et tout servi.
L'hote, en meme temps, montrait une voiture organisee de la facon
la plus confortable, et attelee, en effet, de deux chevaux qui
frappaient du pied tandis que le postillon prenait patience, en
vidant, sur le bord de la fenetre, une bouteille de vin de Cahors.
Le premier mouvement de celui a qui cette offre etait faite fut
negatif; cependant, apres une seconde de reflexion, le plus age
des deux voyageurs, comme s'il fut revenu sur sa determination
premiere, fit un signe interrogateur a son compagnon.
Celui-ci repondit d'un regard qui signifiait: "Vous savez bien que
je suis a vos ordres."
-- Eh bien, soit, dit celui qui paraissait charge de prendre
l'initiative, nous dinerons a table d'hote.
Puis, se retournant vers le postillon qui, chapeau bas, attendait
ses ordres:
-- Que dans une demi-heure au plus tard, dit-il, les chevaux
soient a la voiture.
Et, sur l'indication du maitre d'hotel, tous deux entrerent dans
la salle a manger, le plus age des deux marchant le premier,
l'autre le suivant.
On sait l'impression que produisent, en general, de nouveaux venus
a une table d'hote. Tous les regards se tournerent vers les
arrivants; la conversation, qui paraissait assez animee, fut
interrompue.
Les convives se composaient des habitues de l'hotel, du voyageur
dont la voiture attendait tout attelee a la porte, d'un marchand
de vin de Bordeaux en sejour momentane a Avignon pour les causes
que nous allons dire, et d'un certain nombre de voyageurs se
rendant de Marseille a Lyon par la diligence.
Les nouveaux arrives saluerent la societe d'une legere inclination
de tete, et se placerent a l'extremite de la table, s'isolant des
autres convives par un intervalle de trois ou quatre couverts.
Cette espece de reserve aristocratique redoubla la curiosite dont
ils etaient l'objet; d'ailleurs, on sentait qu'on avait affaire a
des personnages d'une incontestable distinction, quoique leurs
vetements fussent de la plus grande simplicite.
Tous deux portaient la botte a retroussis sur la culotte courte,
l'habit a longues basques, le surtout de voyage et le chapeau a
larges bords, ce qui etait
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