ous a fait de la peine, milord; et en quoi?
-- Parce qu'en Angleterre, un gentleman ne jette pas une assiette
a la tete d'un autre gentleman.
-- Ah! milord, dit Roland en se levant et froncant le sourcil,
seriez-vous venu, par hasard, pour me faire une lecon?
-- Oh! non; je suis venu vous dire: vous etes embarrasse peut-etre
de trouver un temoin?
-- Ma foi, sir John, je vous l'avouerai, et, au moment ou vous
avez frappe a la porte, je m'interrogeais pour savoir a qui je
demanderais ce service.
-- Moi, si voulez, dit l'Anglais, je serai votre temoin.
-- Ah! pardieu! fit Roland, j'accepte et de grand coeur!
-- Voila le service que je voulais rendre, moi, a vous!
Roland lui tendit la main.
-- Merci, dit-il.
L'Anglais s'inclina.
-- Maintenant, continua Roland, vous avez eu le bon gout, milord,
avant de m'offrir vos services, de me dire qui vous etiez; il est
trop juste, du moment ou je les accepte, que vous sachiez qui je
suis.
-- Oh! comme vous voudrez.
-- Je me nomme Louis de Montrevel; je suis aide de camp du general
Bonaparte.
-- Aide de camp du general Bonaparte! je suis bien aise.
-- Cela vous explique comment j'ai pris, un peu trop chaudement
peut-etre, la defense de mon general.
-- Non, pas trop chaudement; seulement, l'assiette...
-- Oui, je sais bien, la provocation pouvait se passer de
l'assiette; mais, que voulez-vous! je la tenais a la main, je ne
savais qu'en faire, je l'ai jetee a la tete de M. de Barjols; elle
est partie toute seule sans que je le voulusse.
-- Vous ne lui direz pas cela, a lui?
-- Oh! soyez tranquille; je vous le dis, a vous, pour mettre votre
conscience en repos.
-- Tres bien; alors, vous vous battrez?
-- Je suis reste pour cela, du moins.
-- Et a quoi vous battrez-vous?
-- Cela ne vous regarde pas, milord.
-- Comment, cela ne me regarde pas?
-- Non; M. de Barjols est l'insulte, c'est a lui de choisir ses
armes.
-- Alors, l'arme qu'il proposera, vous l'accepterez?
-- Pas moi, sir John, mais vous, en mon nom, puisque vous me
faites l'honneur d'etre mon temoin.
-- Et, si c'est le pistolet qu'il choisit, a quelle distance et
comment desirez-vous vous battre?
-- Ceci, c'est votre affaire, milord, et non la mienne. Je ne sais
pas si cela se fait ainsi en Angleterre, mais, en France, les
combattants ne se melent de rien; c'est aux temoins d'arranger les
choses; ce qu'ils font est toujours bien fait.
-- Alors ce que je ferai
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