ncs roides et rocailleux de la montagne, et jetant
des cailloux dans le bassin.
Sir John ouvrait la bouche pour lui dire que tout etait pret; mais
lui, sans donner a l'Anglais le temps de parler:
-- Vous ne savez pas ce que me raconte cet enfant, milord! Une
veritable legende des bords du Rhin. Il dit que ce bassin, dont on
ne connait pas le fond, s'etend a plus de deux ou trois lieues
sous la montagne, et sert de demeure a une fee, moitie femme,
moitie serpent, qui, dans les nuits calmes et pures de l'ete,
glisse a la surface de l'eau, appelant les patres de la montagne
et ne leur montrant, bien entendu, que sa tete aux longs cheveux,
ses epaules nues et ses beaux bras; mais les imbeciles se laissent
prendre a ce semblant de femme: ils s'approchent, lui font signe
de venir a eux, tandis que, de son cote, la fee leur fait signe de
venir a elle. Les imprudents s'avancent sans s'en apercevoir, ne
regardant pas a leurs pieds; tout a coup la terre leur manque, la
fee etend le bras, plonge avec eux dans ses palais humides, et, le
lendemain, reparait seule. Qui diable a pu faire a ces idiots de
bergers le meme conte que Virgile racontait en si beaux vers a
Auguste et a Mecene?
Il demeura pensif un instant, et les yeux fixes sur cette eau
azuree et profonde; puis, se retournant vers sir John:
-- On dit que jamais nageur, si vigoureux qu'il soit, n'a reparu
apres avoir plonge dans ce gouffre; si j'y plongeais, milord, ce
serait peut-etre plus sur que la balle de M. de Barjols. Au fait,
ce sera toujours une derniere ressource; en attendant, essayons de
la balle. Allons, milord, allons.
Et, prenant par dessous le bras l'Anglais emerveille de cette
mobilite d'esprit, il le ramena vers ceux qui les attendaient.
Eux, pendant ce temps, s'etaient occupes de chercher un endroit
convenable et l'avaient trouve.
C'etait un petit plateau, accroche en quelque sorte a la rampe
escarpee de la montagne, expose au soleil couchant et portant une
espece de chateau en ruine, qui servait d'asile aux patres surpris
par le mistral.
Un espace plan, d'une cinquantaine de pas de long et d'une
vingtaine de pas de large, lequel avait du etre autrefois la
plate-forme du chateau, allait etre le theatre du drame qui
approchait de son denouement.
-- Nous voici, messieurs, dit sir John.
-- Nous sommes prets, messieurs, dit M. de Valensolle.
-- Que les adversaires veuillent bien ecouter les conditions du
combat, dit sir John.
Puis, s
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