la jonction de Clerfayt, qui arrivait de la Champagne, prendre le
duc Albert a revers, et executer ainsi ce qu'il avait eu le tort de ne pas
faire d'abord en negligeant de courir sur le Rhin et de suivre ce fleuve
jusqu'a Cleves; mais son plan etait autre, et il preferait a une marche
savante une action eclatante qui redoublat le courage des soldats, deja
tres releve par la canonnade de Valmy, et qui detruisit l'opinion etablie
en Europe, depuis cinquante ans, que les Francais, excellens pour des
coups de main, etaient incapables de gagner une bataille rangee. La
superiorite du nombre lui permettait une tentative pareille, et cette idee
avait sa profondeur, aussi bien que les manoeuvres qu'on lui a reproche de
n'avoir pas employees. Cependant il ne negligea pas de tourner l'ennemi et
de le separer de Clerfayt. Valence, place a cet effet le long de la Meuse,
devait marcher de Givet sur Namur et sur Liege, avec l'armee des Ardennes,
forte de dix-huit mille hommes. D'Harville, avec douze mille, avait ordre
de se mouvoir entre la grande armee et Valence, pour tourner l'ennemi de
plus pres. Telles etaient les dispositions de Dumouriez a sa droite. A sa
gauche, Labourdonnaie devait, en partant de Lille, parcourir la cote de la
Flandre et s'emparer de toutes les places maritimes. Arrive a Anvers, il
lui avait ete prescrit de longer la frontiere hollandaise, et de joindre
la Meuse a Ruremonde. La Belgique se trouvant ainsi enfermee dans un
cercle, Dumouriez en occupait le centre avec une masse de quarante mille
hommes, et pouvait accabler les ennemis sur le premier point ou ils
voudraient tenir tete aux Francais.
Impatient d'entrer en campagne et de s'ouvrir la vaste carriere ou
s'elancait son ardente imagination, Dumouriez pressait l'arrivee des
approvisionnemens qu'on lui avait promis a Paris, et qui auraient du etre
rendus le 25 a Valenciennes. Servan avait quitte le ministere de la
guerre, preferant au chaos de l'administration les fonctions moins agitees
d'un commandement d'armee. Il retablissait sa tete et sa sante dans son
camp des Pyrenees. Roland avait propose et fait accepter pour son
successeur, Pache, homme simple, eclaire, laborieux, qui, ayant autrefois
quitte la France pour aller vivre en Suisse, etait revenu a l'epoque de la
revolution, avait rendu le brevet d'une pension qu'il recevait du marechal
de Castries, et s'etait distingue dans les bureaux de l'interieur par un
esprit et une application rares. Portant da
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