on jugera le roi sera le meme que
celui avec lequel on etablira la republique... La mesure de votre
philosophie dans ce jugement sera aussi la mesure de votre liberte dans la
constitution!"
Il etait pourtant des esprits qui, moins fanatises que Saint-Just,
s'efforcaient de se placer dans des rapports plus vrais, et tachaient
d'amener l'assemblee, a considerer les choses sous un point de vue plus
juste. "Voyez, avait dit Rouzet (seance du 15 novembre), la veritable
situation du roi dans la constitution de 1791. Il etait place en presence
de la representation nationale pour rivaliser avec elle. N'etait-il pas
naturel qu'il cherchat a recouvrer le plus possible du pouvoir qu'il avait
perdu? N'etait-ce pas vous qui lui aviez ouvert cette lice, et qui l'aviez
appele a y lutter avec la puissance legislative? Eh bien! dans cette lice,
il a ete vaincu; il est seul, desarme, abattu aux pieds de vingt-cinq
millions d'hommes, et ces vingt-cinq millions d'hommes auraient l'inutile
lachete d'immoler le vaincu! D'ailleurs, ajoutait Rouzet, cet eternel
penchant a dominer, penchant qui remplit le coeur de tous les hommes,
Louis XVI ne l'avait-il pas reprime dans le sien, plus qu'aucun souverain
du monde? N'a-t-il pas fait, en 1789, un sacrifice volontaire d'une partie
de son autorite? N'a-t-il pas renonce a une partie des droits que ses
predecesseurs s'etaient permis d'exercer? N'a-t-il pas aboli la servitude
dans ses domaines? N'a-t-il pas appele dans ses conseils les ministres
philosophes, et jusqu'a ces empiriques que la voix publique lui designait?
N'a-t-il pas convoque les etats-generaux, et rendu au tiers-etat une
partie de ses droits?"
Faure, depute de la Seine-Inferieure, avait montre plus de hardiesse
encore. Se rappelant la conduite de Louis XVI, il avait ose en reveiller
le souvenir. "La volonte du peuple, avait-il dit, aurait pu sevir contre
Titus, aussi bien que contre Neron, et elle aurait pu lui trouver des
crimes, ne fut-ce que ceux commis devant Jerusalem. Mais ou sont ceux que
vous imputez a Louis XVI? J'ai mis toute mon attention aux pieces lues
contre lui; je n'y ai trouve que la faiblesse d'un homme qui se laisse
aller a toutes les esperances qu'on lui donne de recouvrer son ancienne
autorite; et je soutiens que tous les monarques morts dans leur lit
etaient plus coupables que lui. Le bon Louis XII meme, en sacrifiant en
Italie cinquante mille Francais pour sa querelle particuliere, etait mille
fois plus crimine
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