evant les baionnettes francaises. C'etait du reste l'opinion de
l'Europe. Il ne fallait rien moins que l'immensite des moyens reunis
contre la France, pour donner a ses ennemis le courage de se mesurer
avec elle. Mais cette confiance du gouvernement francais dans ses
forces etait exageree, et lui cachait une partie des difficultes de sa
position. La suite a prouve que ses ressources etaient immenses, mais
que dans le moment elles n'etaient pas encore assez assurees pour
garantir la victoire. Le directoire, outre la France, avait a
administrer la Hollande, la Suisse, toute l'Italie, partagees en
autant de republiques. Les administrer par l'intermediaire de leur
gouvernement, etait, comme on l'a vu, encore plus difficile que si on
avait commande directement chez elles. On n'en pouvait presque
tirer aucune ressource, ni en argent ni en hommes, par le defaut
d'organisation. Il fallait cependant les defendre, et des lors combattre
sur une ligne qui, depuis le Texel, s'etendait sans interruption jusqu'a
l'Adriatique, ligne qui, attaquee de front par la Russie et l'Autriche,
etait prise a revers par les flottes anglaises, soit en Hollande, soit a
Naples. Les forces qu'une telle situation militaire exigeait, il fallait
les tirer de France seulement. Or, les armees etaient singulierement
affaiblies. Quarante mille soldats, les meilleurs, etaient en Egypte
sous notre grand capitaine. Les armees restees en France etaient
diminuees de moitie par l'effet des desertions que la paix amene
toujours. Le gouvernement payait le meme nombre de soldats, mais il
n'avait peut-etre pas cent cinquante mille hommes effectifs. Les
administrations et les etats-majors faisaient le profit sur la solde,
et c'etait une surcharge inutile pour les finances. Ces cent cinquante
mille hommes effectifs formaient des cadres excellens, qu'on pouvait
remplir avec la nouvelle levee des conscrits; mais il fallait du temps
pour cela, et on n'en avait pas eu assez depuis retablissement de
la conscription. Enfin, les finances etaient toujours dans le meme
delabrement, par la mauvaise organisation de la perception. On avait
vote un budget de 600 millions, et une ressource extraordinaire de 125
millions, prise sur les 400 millions restans de biens nationaux; mais
la lenteur des rentrees, et l'erreur dans l'evaluation de certains
produits, laissaient un deficit considerable. Enfin la subordination, si
necessaire dans une machine aussi vaste, commencait a disparaitre. Le
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