se rappelle la campagne de Custine sur le Rhin. Charge d'une division
de l'armee, il avait trouve Spire et Worms mal surveilles, parce que les
coalises, presses de marcher sur la Champagne, avaient tout neglige sur
leurs ailes et sur leurs derrieres. Des patriotes allemands, accourus de
tous cotes, lui offraient leurs villes; il s'avanca, prit Spire, Worms,
qu'on lui livra, negligea Manheim, qui etait sur sa route, par menagement
pour la neutralite de l'electeur palatin, et par crainte aussi de ne pas y
entrer aisement. Il arriva enfin a Mayence, s'en empara, rejouit la France
de ses conquetes inattendues, et se fit conferer un commandement qui le
rendait independant de Biron. Dans ce meme moment, Dumouriez venait de
repousser les Prussiens, et de les rejeter sur le Rhin. Kellermann etait
vers Treves. Custine devait alors descendre le Rhin jusqu'a Coblentz, se
reunir a Kellermann, et se rendre ainsi maitre de la rive du fleuve. Toutes
les raisons se reunissaient en faveur de ce plan. Les habitans de Coblentz
appelaient Custine, ceux de Saint-Goard, de Rhinfelds, l'appelaient aussi;
on ne sait jusqu'ou il aurait pu aller en s'abandonnant au cours du Rhin.
Peut-etre aurait-il pu descendre jusqu'en Hollande. Mais, de l'interieur de
l'Allemagne, d'autres patriotes le demandaient aussi; on s'etait figure, en
le voyant avancer si hardiment, qu'il avait cent mille hommes. Percer sur
le territoire ennemi et au-dela du Rhin, plut davantage a l'imagination et
a la vanite de Custine. Il courut a Francfort lever des contributions, et
exercer des vexations impolitiques. La, les sollicitations l'entourerent de
nouveau. Des fous le pressaient d'aller jusques a Cassel, au milieu de la
Hesse electorale, prendre le tresor de l'electeur. Les avis plus sages du
gouvernement francais l'engageaient a revenir sur le Rhin, et a marcher
vers Coblentz. Mais il n'ecoutait rien, et revait une revolution en
Allemagne.
Cependant Custine sentait le danger de sa position: voyant bien que, si
l'electeur rompait la neutralite, ses derrieres seraient menaces par
Manheim, il aurait voulu prendre cette place qu'on lui offrait, mais il ne
l'osait pas. Sur le point d'etre attaque a Francfort, ou il ne pouvait
tenir, il ne voulait pas abandonner cette ville, et rentrer sur la ligne du
Rhin, pour ne point abandonner ses pretendues conquetes, et ne pas
s'engager dans les operations des autres chefs en descendant vers Coblentz.
Dans cette situation, il fut surpri
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