ain et des radis, Monsieur.
LE VALET DE CHAMBRE
Pauvre dejeuner, mon garcon; je vais t'en donner un meilleur: une
bonne tasse de cafe au lait avec une tartine de pain et de beurre.
BLAISE
Je vous remercie bien, Monsieur, je n'ai plus faim; je n'en mangerai
pas.
LE VALET DE CHAMBRE
Bah! Bah! les bonnes choses se mangent sans faim.
BLAISE
Non, Monsieur, en verite, je n'y gouterai seulement pas.
LE VALET DE CHAMBRE
Eh bien, un verre de frontignan avec un biscuit?
BLAISE
Pas davantage, Monsieur, en vous remerciant de votre obligeance.
--Tu l'avaleras, mon ami; tiens, voici les biscuits, dit-il en placant
devant Blaise une assiette de biscuits; et voici le vin", ajouta-t-il
en mettant a cote un verre de frontignan.
Au moment ou il posait la bouteille, il entendit le bruit d'une porte
bien connu; c'etait celle du comte; en une seconde le valet de
chambre et ses camarades disparurent, laissant Blaise seul, devant la
bouteille de frontignan et les biscuits.
Le comte entra pour envoyer chercher Blaise, que Jules demandait. Son
etonnement fut grand en le voyant tout seul, les armoires ouvertes et
le frontignan et les biscuits devant lui.
"Je te prends donc sur le fait, dit le comte revenu de sa surprise.
Saint Blaise enrole dans les voleurs? Belle conduite, en verite! Tu ne
manques pas de front ni de hardiesse, mon garcon. Venir jusqu'ici pour
voler mon vin et mes biscuits en l'absence de mes gens! c'est tres
bien! tres bien!
--Monsieur le comte, vous vous trompez, dit Blaise les larmes aux
yeux. Je n'ai touche a rien, et ce n'est certainement pas moi qui ai
sorti ce vin et ces biscuits!
LE COMTE
Et qui donc? Serait-ce moi, par hasard?
BLAISE
Non, Monsieur le comte, je sais que ce n'est pas vous; mais, croyez-en
ma parole, ce n'est pas moi non plus.
LE COMTE
Et qui donc alors? Que fais-tu ici? Pourquoi es-tu seul devant ces
armoires ouvertes, cette bouteille posee devant toi, et ce verre plein
place pour etre bu?
BLAISE
Vous dire qui, Monsieur le comte, je ne le puis, quoique je le sache.
Je suis ici pour avoir de quoi faire un cerf-volant a M. Jules, qui
m'attend. Quant aux armoires et au reste, je n'en suis pas coupable,
et je vous supplie de me croire.
--Ce garcon-la est incomprehensible, dit le comte a mi-voix; il vous
domine malgre vous: me voici dispose et oblige a le croire, malgre
ma raison et l'evidence des faits.--C'est bon, va chez Jules qui
t'attend, ajo
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