obtint du bon Dieu un leger
adoucissement aux souffrances de Jules; quand le comte se releva,
Jules dormait d'un sommeil assez calme.
Le comte le regarda avec esperance et bonheur; il releva Blaise,
toujours agenouille pres du lit de Jules, lui serra les mains dans les
siennes et lui dit a voix basse:
"Reste pres de lui, mon enfant, pendant que je vais m'habiller. S'il
s'eveille, viens me chercher."
Jules dormit pres d'une heure; le comte etait revenu s'etablir pres
de son lit, gardant Blaise pres de lui. Le medecin n'arrivait pas;
le comte ne savait que faire pour degager la tete si evidemment
embarrassee. La bonne n'y entendait rien non plus; Mme de Trenilly
etait restee a Paris pour le renouvellement de la premiere communion
d'Helene.
Jules s'eveilla; il ouvrit de grands yeux, regarda son pere et Blaise
sans les reconnaitre.
"Je veux Blaise, dit-il... Il faut que je lui parle... Ne laissez
pas entrer papa,... qu'il n'entende pas ce que je dirai... Appelez
Blaise;... quand je lui aurai parle, ma tete brulera moins;... c'est
si lourd dans ma tete... Tout ce que je veux dire pese tantot dans ma
tete, tantot dans mon coeur.
--Monsieur Jules, je suis pres de vous, dit Blaise en s'approchant
timidement.
--Qui es-tu? Va-t'en!... Je veux Blaise.
--C'est moi qui suis Blaise. Monsieur Jules; je viens vous soigner.
--Alors tu n'es pas Blaise... Blaise me deteste... Tu sais bien tout
ce que j'ai dit de lui?... Eh bien, ce n'etait pas vrai... Tout, tout
etait faux... Tu sais bien les poulets?... c'est moi qui les avais
noyes... Tu sais bien les habits mouilles? c'est lui qui m'a donne les
siens; c'est lui qui m'a tire de l'eau; c'est lui qui a toujours ete
bon et moi toujours mechant... Tu sais bien les fleurs? c'est moi qui
ai tout brise; c'est moi qui les ai fait demander par Blaise... Tu
sais bien le cerf-volant? c'est moi qui ai ete mechant, si mechant!...
Blaise a ete si bon que cela m'a remue le coeur,... mais pas assez,...
non... pas assez... Pauvre Blaise!... Tu as entendu comme il m'a
pardonne?... Et papa aussi,... Blaise lui a pardonne!... Papa a ete
mechant pour Blaise!... C'est ma faute,... c'est moi qui mentais. Oh!
ma tete!... Blaise! je veux Blaise!"
Le pauvre comte etait dans un etat deplorable. Chaque parole etait
pour lui une affreuse revelation de sa propre faiblesse, de sa propre
injustice et de la mechancete de son fils. La tete cachee dans les
mains, il sanglotait a faire pitie; ses l
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