les la premiere
pensee de l'aveu comme expiation; il mettait entre ses mains le moyen
d'apaiser sa conscience, de retrouver le calme qu'il avait perdu.
Jules recut les paroles de Blaise avec quelque surprise melee de
satisfaction; il sentait vaguement qu'il pouvait tout reparer; mais,
trop faible pour reflechir serieusement, il se laissa aller au sommeil
et dormit encore deux bonnes heures.
M. de Trenilly osait a peine remuer, tant il avait peur de troubler le
repos de Jules; il desirait dire quelques mots a Blaise, et il n'osait
parler. Blaise, s'apercevant de son angoisse, se leva sans bruit,
arriva jusqu'a lui sur la pointe des pieds; quand il fut a la portee
du comte, celui-ci l'attira doucement a lui, le serra vivement dans
ses bras et lui dit bas a l'oreille:
"Dis-lui que je sais tout, que je lui pardonne, que je l'aime, que
c'est toi qui as change mon coeur, que tu es son frere, mon second
enfant.
--Je lui dirai combien vous etes bon, Monsieur le comte, repondit
Blaise tout bas.
LE COMTE
Rassure-le, encourage-le, mon ami, mon bon Blaise, afin qu'il n'ait
plus peur de moi. Ah! cette pensee me tue.
BLAISE
J'arrangerai tout avec l'aide du bon Dieu, mon bon Monsieur le comte;
ayez confiance, vous en serez recompense."
Le comte ne le retint plus, et, cachant sa tete dans ses mains, il
reflechit a la piete de Blaise et aux vertus veritablement admirables
de cet enfant.
"Comment a-t-il appris tout cela? se demandait-il avec surprise. Ce
pauvre enfant de portier a les sentiments eleves d'un prince, la
science d'un savant, la generosite, la charite d'un saint. Quand il
me parle, il m'emeut; quand il me console, ses paroles penetrent mon
coeur de si doux sentiments que je ne sens plus mes inquietudes ni
mon malheur. Quand il me reprend, il me fait rougir comme s'il avait
autorite sur moi. Pourquoi tout cela?... Pourquoi? ajouta-t-il; parce
qu'il est pieux, parce qu'il a suivi avec fruit les instructions du
catechisme, parce qu'il va faire sa premiere communion, parce qu'il
est un saint enfant de Dieu... Et mon Jules, mon pauvre Jules,
qu'est-il aupres de cet enfant? Un malheureux pecheur, un miserable
comme moi. Ah! que le bon Dieu me rende mon enfant, et je me
confesserai avec lui et je recevrai le bon Dieu pres de lui, et je
m'ameliorerai avec lui, et notre maitre a tous deux sera ce pauvre
enfant calomnie, outrage, maltraite par nous... J'aime cet enfant;
je l'aime a l'egal du mien, je le respec
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