les mains du comte,
l'encourageait, le consolait, lui parlait du bon Dieu, lui enseignait
la priere du coeur, la vraie priere du chretien. Quand il ne pouvait
calmer le desespoir du comte, il se mettait a genoux pres de lui et
disait tout haut les prieres les plus touchantes, qui finissaient
toujours par diminuer l'agitation du comte et lui rendre l'esperance.
L'etat de Jules etait le meme depuis six jours: tantot de
l'amelioration, tantot une reprise de delire et de fievre. Le septieme
jour, apres un sommeil de trois heures, dont avaient profite le comte
et Blaise pour s'assoupir dans leurs fauteuils, Jules s'eveilla et
appela Blaise comme de coutume.
"Me voici, Monsieur Jules, dit Blaise en sautant sur ses pieds et
prenant sa main.
JULES
Ah! Blaise, c'est toi! Je suis content! J'avais tant besoin de te voir
et de te parler. Pauvre Blaise! j'ai ete mechant pour toi! Comment
peux-tu me pardonner?
BLAISE
Mon bon Monsieur Jules, de tout mon coeur, du fond de mon coeur, je
vous ai pardonne depuis bien longtemps. Notre-Seigneur n'a-t-il pas
pardonne a tous ceux qui l'ont offense? Ne devons-nous pas tous faire
de meme? Soyez tranquille, Monsieur Jules, ne vous agitez pas; nous
parlerons de cela plus tard.
JULES
Je suis si faible; j'ai ete bien malade, il me semble?
BLAISE
Oui, mais vous etes mieux. Buvez un peu et dormez encore."
Jules but de l'orangeade.
"C'est bon, dit-il; et toi, Blaise, comme tu es bon de rester pres de
moi! J'ai ete si mechant pour toi! Oh! si tu savais, comme tout cela
me brulait la tete et le coeur!
--Chut, Monsieur Jules: ne parlez pas; vous vous ferez mal."
Le comte, heureux de ce retour de Jules a la raison, ne pouvant
maitriser sa joie, fut sur le point de se montrer et d'embrasser son
enfant, qu'il avait cru perdu, quand Jules retourna la tete et dit a
Blaise:
"Blaise, ne dis pas a papa que je t'ai parle; ne le laisse pas venir;
si je le vois, je mourrai de honte et de frayeur.
BLAISE
Non, non, Monsieur Jules; je ne dirai rien, soyez bien tranquille;
mais votre papa est si bon pour vous, il vous aime tant, que vous ne
devez pas en avoir peur.
JULES
Mais la honte, Blaise, la honte?
BLAISE
Eh bien, monsieur Jules, ce sera l'expiation de votre faute: ce sera
beau de tout avouer. Mais vous avez le temps d'y penser, Dieu merci:
ainsi tachez de dormir encore; nous causerons de cela plus tard."
Blaise fut satisfait d'avoir pu jeter dans l'ame de Ju
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