atin de _jus droit_; les enfants s'en servent
meme dans leurs jeux pour designer le but conventionnel). Alors, quand
le reclamant a assemble les arbitres, on signale la fraude et on cherche
la borne veritable, l'ancien terme qu'a moins d'un sacrilege en lui-meme
beaucoup plus redoutable que la fraude, le delinquant n'a pu se
permettre d'enlever. Il est bien rare qu'on ne le retrouve pas. C'est
une plus grosse pierre que toutes les autres, enfoncee a une assez
grande profondeur pour que le socle de la charrue n'ait pu la soulever.
Cette pierre brute, c'est le dieu antique. Pour l'arracher de sa base,
il eut fallu deux choses: une audace de scepticisme dont la mauvaise foi
elle-meme ne se sent pas souvent capable, et un travail particulier qui
eut rendu la trahison evidente; il eut fallu venir la nuit, avec
d'autres instruments que la charrue, choisir le temps ou la terre est
en jachere, et ou le ble arrache et foule, le sillon interrompu, ne
peuvent pas laisser de traces revelatrices. Enfin, c'est parfois un rude
ouvrage: la pierre est lourde, il faut la transporter et la transplanter
plus loin, au risque de ne pouvoir en venir a bout tout seul. Il faut un
ou plusieurs complices. On ne s'expose guere a cela pour un ou plusieurs
sillons de plus.
Quand l'expertise est faite, quand chacun, ayant donne sa voix, declare
que la doit etre le _jus_ primitif, on creuse un peu, et on retrouve le
dieu disparu sous l'exhaussement progressif du sol. Le faux dieu est
brise, et la limite est de nouveau signalee et consacree. Le fraudeur en
est quitte pour dire qu'il s'etait trompe, qu'une grosse pierre emportee
peu a peu par le travail du labourage a cause sa meprise, et qu'il
regrette de n'avoir pas ete averti plus tot. Cela laisse bien quelques
doutes, mais il n'a pas touche aux vrai _jus_, il n'est pas deshonore.
En general, le _jus_ sort de terre de quelques centimetres, et, le
dimanche des Rameaux, il recoit l'hommage du buis benit, comme celui des
Romains recevait un collier ou une couronne de feuillage.
Les eaux lustrales, d'origine hebraique, paienne, indoue, universelle
probablement, recoivent aussi chaque annee des honneurs et de nouvelles
consecrations religieuses. Elles guerissent diverses sortes de maux, et
principalement les plaies, paralysies et autres _estropiaisons_. Les
infirmes y plongent leurs membres malades au moment de la benediction du
pretre; les fievreux boivent volontiers au meme courant. La foi purifie
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