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ra et excusera
cette hardiesse. Je n'ai pas change la date de la lettre de Maurice,
date qui temoigne d'un empressement non seconde jusqu'ici par les
circonstances.
Quoique guerie, je n'ai pas la permission du medecin pour aller a Paris,
ou je ne manque jamais de prendre la grippe, et je dois passer levrier
et mars dans le Midi; je reve les cistes et les bruyeres en fleurs du
Piemont ou des frontieres francaises; car ma passion du moment, c'est la
botanique. Si vous allez par la, courir apres cette solitude qui fuit
les princes, vous etes bien sur de me rencontrer dans le coin le plus
champetre et le plus retire, vous aimant toujours d'un coeur sincere et
devoue tendrement.
GEORGE SAND.
CDLXIII
A M. ALEXANDRE DUMAS FILS, A PARIS
Nohant, 11 decembre 1860.
Cher enfant,
Je veux vous demander quelle preparation de fer on vous administre. Le
fer est tres a la mode et c'est bien vu. Mais les medecins ne sont pas
tous chimistes, et, en prescrivant le fer tres a propos, ils ne savent
pas toujours, meme les plus habiles en tant que medecins, sous quelle
forme il s'assimile avantageusement et reellement a notre economie, et
sous quelles autres, formes il charge l'estomac, s'y transforme _en
encre_ et ne s'assimile en aucune facon. J'ai un vieux ami, medecin et
chimiste, qui a l'emploi du fer et de diverses preparations a l'etat
d'idee fixe, et qui a essaye et travaille ce medicament durant des
annees. J'ai fait avec lui des experiences nombreuses et _je sais_ qu'il
a raison de dire qu'une seule des preparations est toujours
assimilable et jamais nuisible. Pour abreger, voyez si vos recettes
portent:--_Tartr. fer. Potass. crist. en paillettes_.--Si oui, dormez
tranquille et comptez que le fer vous guerira;--si non, n'en abusez pas
et meme n'en usez pas. Je sais bien que vous devez avoir les _princes de
la science_, comme on dit, dans votre manche. Mais peut-etre les princes
n'ont-ils pas le loisir d'analyser minutieusement ces details. Et, au
bout du compte, tout en vous soignant bien, ne vous soignez pas trop; le
grand remede sera une vie moderee en toute chose, pendant quelque temps;
beaucoup d'air pur et de campagne, et l'oubli du _moi_ le plus souvent
possible.
Notre grand mal a nous autres, c'est l'excitation; mais il y a aussi
grand mal a vouloir la supprimer tout a fait; car nous ne sommes
point batis comme les oisifs ouies positivistes, et l'absence totale
d'emotio
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