tout au contraire, tenant la grace meilleure que la justice.
Durant quatre ou cinq siecles, elle fut assiegee de solliciteurs. Les
pelerins, venus de toutes les parties du royaume, suppliaient, les mains
jointes, la belle dame de Liesse de ne point dormir tandis qu'ils lui
parlaient. Maintenant elle sommeille en paix dans son sanctuaire
deserte. Ne troublons point son repos et venerons en elle la foi,
l'esperance et la charite de tant d'ames qui passerent avant nous sur
cette terre ou nous passons.
Si l'on vient du chateau de Marchais, avons-nous dit, on rencontre, a
droite sur la route en entrant a Liesse, trois ormes autour d'une
chapelle grillee. On les appelle les Trois-Chevaliers, en memoire des
trois fils de la dame d'Eppes, qui rapporterent d'Egypte en Picardie
l'image miraculeuse qui fut ensuite veneree sur la terre de Liance, dite
depuis terre de Liesse.
Voici l'histoire des trois chevaliers d'Eppes et de la belle Ismerie:
HISTOIRE DES TROIS CHEVALIERS D'EPPES ET DE LA BELLE ISMERIE.
En ce temps-la, Foulques, comte d'Anjou, de Touraine et de Mayenne, roi
de Jerusalem, prit d'assaut Cesaree de Philippes, qui etait l'ancienne
ville de Dann situee a l'une des extremites de son royaume. Il rebatit
le chateau de Bersabee, qui etait a l'autre extremite, et retablit ainsi
dans son entier le royaume de David et de Salomon, qui s'etendait, dit
l'Ecriture, de Dan a Bersabee.
La garde du chateau de Bersabee fut confiee aux chevaliers de Saint-Jean
de Jerusalem, eriges en ordre militaire environ trente ans auparavant,
sous le regne de Baudouin 1er. Or, au nombre de ces chevaliers etaient
trois freres de l'illustre maison d'Eppes, en Picardie, dont l'aine ne
sommait le chevalier d'Eppes, le second le chevalier de Marchais, et le
plus jeune le chevalier aux armes blanches. Mme d'Eppes, leur mere,
possedait de grandes et belles terres dans le pays de Laon. Mais ils
avaient pris la croix du pelerin et porte dans la terre sanctifiee par
le sang de Jesus la banniere d'Eppes aux alerions d'or. Et parce que
leur prudence et leur courage etaient connus, Foulques d'Anjou leur
avait designe pour poste le chateau de Bersabee qui, situe a seize
milles d'Ascalon, etait sans cesse menace par les Sarrasins.
En effet, Ascalon, ancienne ville des Philistins, etait au pouvoir du
calife d'Egypte, qui y envoyait quatre fois l'an, par terre ou par mer,
des armes, des vivres et des troupes fraiches. La population de cette
ville eta
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