e le separait pas de septembre, parce que dans
ces jours malheureux, lorsque toutes les autorites, l'assemblee, les
ministres, le maire, parlaient en vain pour arreter les massacres, le
ministre seul de la justice _ne parlait pas_, parce qu'enfin, dans les
fameux placards, il etait excepte seul des calomnies repandues contre les
plus purs des citoyens. "Et puisses-tu, s'ecriait Louvet, puisses-tu,
"o Danton, te laver aux yeux de la posterite de "cette deshonorante
exception!" Des applaudissemens avaient accueilli ces paroles aussi
genereuses qu'imprudentes.
Cette accusation, constamment applaudie, n'avait cependant pas ete
entendue sans beaucoup de murmures; mais un mot souvent repete pendant la
seance les avait arretes. "Assurez-moi du silence, avait dit Louvet au
president, _car je vais toucher le mal_, et on criera.--Appuie, avait dit
Danton, touche le mal." Et chaque fois que s'elevaient des murmures:_
Silence!_ criait-on, _silence, les blesses!_
Louvet resume enfin son accusation. "Robespierre, "s'ecrie-t-il, je
t'accuse d'avoir calomnie "les plus purs citoyens, et de l'avoir fait le
jour "ou les calomnies etaient des proscriptions; je t'accuse de t'etre
produit toi-meme comme un objet d'idolatrie, et d'avoir fait repandre que
tu etais le seul homme capable de sauver la France; je t'accuse d'avoir
avili, insulte et persecute la representation nationale, d'avoir tyrannise
l'assemblee electorale de Paris, et d'avoir marche au supreme pouvoir par
la calomnie, la violence et la terreur, et je demande un comite pour
examiner ta conduite." Louvet propose une loi qui condamne au bannissement
quiconque aura fait de son nom un sujet de division entre les citoyens. Il
veut qu'aux mesures dont la commission des neuf prepare le projet, on en
ajoute une nouvelle, c'est de mettre la force armee a la disposition du
ministre de l'interieur. "Enfin, dit-il, je demande sur l'heure un decret
d'accusation contre Marat!... Dieux! s'ecrie-t-il, dieux! je l'ai nomme!"
Robespierre, etourdi des applaudissemens prodigues a son adversaire, veut
prendre la parole. Au milieu du bruit et des murmures qu'excite sa
presence, il hesite; ses traits et sa voix sont alteres; il se fait
entendre cependant, et demande un delai pour preparer sa defense. Le delai
lui est accorde, et la defense est ajournee au 5 novembre. Le renvoi etait
heureux pour l'accuse, car, excitee par Louvet, l'assemblee ressentait ce
jour-la une vive indignation.
Le soir,
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