ebes, notre vieille mere. Nous reverrons
Denderah en descendant, et apres une station au Caire nous nous
retrouverons bientot a Alexandrie.
Si l'on doit voir un obelisque egyptien a Paris, comme vous me
l'ecrivez, que ce soit un de ceux de Louqsor; Thebes se consolera de cet
enlevement en gardant l'obelisque de Karnac, le plus beau de tous et le
plus digne d'admiration; mais je ne donnerai jamais mon adhesion (dont
on saura fort bien se passer, sans doute) au projet de scier en trois
parties un de ces magnifiques monolithes; ce serait un sacrilege: tout
ou rien. Je ne doute pas qu'on ne puisse mettre sur le Nil et charger
sur un radeau proportionne l'un des deux obelisques de Louqsor, et je
designe celui de droite pour de tres-bonnes raisons, quoique le
pyramidion en soit altere et que le monolithe soit moins eleve de
quelques pieds que celui de gauche. Les grandes eaux de l'inondation
emmeneraient facilement l'embarcation jusqu'a Alexandrie, et la mer
ferait le reste[Footnote: L'evenement a prouve combien les previsions de
Champollion le jeune etaient justes.]; voila ce qui est possible, et le
seul plan que je puisse proposer, d'apres la connaissance complete des
localites et des monuments. Paris a besoin d'un ou deux echantillons des
grands travaux de l'architecture egyptienne, qui etaient si instructifs
pour ceux qui les visitaient dans le temps de leur splendeur; car il est
vrai que toute l'histoire nationale y etait inscrite, et nos monuments
modernes ne sont pas destines a rendre de tels services a notre
posterite. Ce que j'y ai appris est prodigieux; Medinet-Habou a fourni
une recolte bien inattendue de noms d'anciens peuples d'Afrique et
d'Asie; il n'y a vraiment qu'a y regarder pour s'enrichir et pour
remplir une grande partie des lacunes qui existent encore dans les
premieres pages de l'histoire generale des hommes. J'espere que je
n'aurai pas travaille sans utilite pour ce grand sujet de mes etudes
dans cette autre terre sainte.
A propos de terre sainte, nous venons d'apprendre que Mgr l'archeveque
de Jerusalem a juge a propos de nous decorer tres-benevolement de la
croix de chevalier du Saint-Sepulcre; que nos diplomes sont arrives a
Alexandrie, ou nous pourrons les retirer moyennant les droits d'usage,
fixes pour nous a cent louis pour chacun. Il parait qu'on ignore sur les
bords du Cedron que les erudits des bords de la Seine ne sont pas des
Cresus, et que la roue de la Fortune ne tourne guere pour eux
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