s'il ne
sont d'ailleurs un tant soit peu industriels; quelle que soit donc notre
ardeur d'arborer la croix de chevalier pour combattre les infideles, je
dois renoncer a cet honneur et me contenter d'avoir ete juge digne de
l'obtenir; ce n'est pas a la pauvre erudition a supporter les charges du
siecle, et ce n'est que de sa plume qu'elle peut concourir au triomphe
de la sainte Sion.
J'ai enfin les lettres de Paris des 30 janvier, 22 mars et 10 avril;
j'attends toujours celles auxquelles j'apporterai moi-meme les
reponses.... Adieu.
VINGT ET UNIEME LETTRE
Sur le Nil, pres d'Antinoe, le 11 septembre 1829.
Le lieu et la date de cette lettre diront clairement que mon voyage de
recherches est termine, et que je retourne au plus vite vers Alexandrie
pour regagner l'Europe et y trouver a la fois contentement de coeur et
repos de corps, dont, au reste, quant au dernier point, je n'eprouve pas
un grand besoin; depuis Denderah, que j'ai quitte le 7 au matin, j'ai en
effet vecu en chanoine; couche toute la journee dans la jolie cange de
notre ami Mohammed-Bey d'Akhmim, qui a bien voulu nous la louer, j'ai
mene une vie tout a fait contemplative, et mon occupation la plus
serieuse a ete de regarder, comme on le fait parfois a Paris, de quel
cote venait le vent et si nos rameurs faisaient leur devoir en
conscience. Le vent du nord nous a longtemps contraries, malgre le
courant du fleuve, enfle outre mesure et au-dessus du maximum de sa
crue. L'inondation de cette annee est magnifique pour ceux qui, comme
nous, voyagent en amateurs, et n'ont dans ces campagnes d'autre interet
que celui du coup d'oeil. Il n'en est pas de meme des pauvres et
malheureux fellahs ou cultivateurs; l'inondation est trop forte; elle a
deja ruine plusieurs recoltes, et le paysan sera oblige, pour ne pas
mourir de faim, de manger le ble que le pacha lui avait laisse pour
l'ensemencement prochain. Nous avons vu des villages entiers delayes par
le fleuve, auquel ne sauraient resister de mesquines cahuttes baties de
limon seche au soleil; les eaux, en beaucoup d'endroits, s'etendent
d'une montagne a l'autre, et la ou les terres plus elevees ne sont point
submergees, nous voyons les miserables fellahs, femmes, hommes et
enfants, portant en toute hate de pleines couffes de terre, dans le
dessein d'opposer a un fleuve immense des digues de trois a quatre
pouces de hauteur, et de sauver ainsi leurs maisons et le peu de
provisions qui leur restent. C'e
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