dans un fauteuil, les mains
jointes, la tete penchee sur le sein. Ce fut a ce moment que maitre
Claude entra.
--Dans quelques minutes, dit-il, une bonne litiere va venir. Tu y
monteras avec dame Gilberte... Moi, je serai a cheval, et, tu sais, ne
va pas avoir peur...
--Avant de partir, je voudrais vous parler, balbutia Violetta avec une
emotion qui la faisait trembler.
Claude palit.
Violetta, cependant, se taisait. Elle avait baisse les yeux, et
continuait a trembler. Claude, par un supreme effort de desespoir,
souriait.
--Voyons, dit-il d'une voix qu'il crut tres naturelle, parle, puisque tu
as quelque chose a me dire... moi, vois-tu, je crois... je...
Brusquement, il tomba a genoux.
--Ecoute-moi, ma petite Violetta. Avant que la bonte du Seigneur ne
t'eut mise dans ma vie comme un rayon de soleil, j'exercais mon metier
sans savoir. Tantot a Montfaucon, tantot en Greve, des fois a la
Croix-du-Trahoir, ou ailleurs, j'allais... on me livrait le condamne, la
condamnee... Est-ce que je savais, moi?... Mon pere, mon grand-pere, mon
arriere-grand-pere, tous avaient tue. J'ai fait comme eux. C'etait le
metier de la famille...
Violetta ecoutait, dans un tel saisissement qu'il lui eut ete impossible
de faire un geste.
--C'etait ainsi, continua-t-il. Et voila qu'un jour je te pris, je te
ramassai, toute frele, toute petite, et si jolie... Tu ne saurais jamais
ce qui s'est passe dans mon coeur a cette minute ou tu tendais tes mains
a la foule?...
--Je tendais... mes mains... a la foule?...
--Bien sur! Et c'est moi qui te pris, puisque tu n'avais pas de pere...
--Pas de pere! cria Violetta secouee d'un tressaillement.
--C'est vrai... tu ne sais pas... je t'ai toujours menti... Je ne suis
pas ton pere..., termina-t-il humblement.
Violetta porta vivement ses mains a ses yeux comme pour les garantir
d'une lumiere trop vive et murmura: --O Simonne, ton agonie a donc dit
la verite...
Elle demeura ainsi, le visage cache dans ses mains, tandis que Claude
reprenait:
--Voila. Je ne suis pas ton pere. Avant que tu ne fusses mienne, avant
que je ne t'eusse ramassee, pauvre petite abandonnee, j'ignorais ce que
c'est que la vie. Mais, quand tu fus a moi, un jour, tout a coup, je
m'apercus que je n'etais plus le meme... j'eus horreur de tuer...
Deja je songeais a ce que tu penserais, a ce que tu dirais, si jamais
l'affreuse verite t'etait revelee... Je crus retrouver la paix en me
faisant relever de mes h
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