aux yeux de la vieille reine...
--Messieurs, dit a haute voix le duc de Guise, Sa Majeste la reine a
bien voulu me promettre, en ce jour memorable, d'employer son credit
a faire cesser la guerre qui desole Paris et son royaume... La reine,
messieurs, continua Guise, a accepte et promis de faire accepter par Sa
Majeste le roi les articles les plus importants de notre Sainte Ligue...
Les gentilshommes de l'escorte demeurerent stupefaits. Ils etaient venus
pour arreter Catherine, pour en faire un otage, et ils assistaient, avec
stupeur, a cette reconciliation imprevue.
--Messieurs, dit alors Catherine, veuillez preparer un cahier de vos
desirs: je reponds de le faire accepter par le roi.
--Vive la reine! crierent les gens de Guise, qui commencerent aussitot a
se retirer.
La reine mere, debout, appuyee a son fauteuil, les regardait s'eloigner
en souriant. Alors, elle se dirigea vers la tapisserie qui masquait la
baie ou M. Peretti, invisible, avait assiste a cette scene. La reine
Catherine de Medicis demeura debout devant ce bourgeois, comme Guise
etait demeure debout devant elle.
--Votre Saintete a vu et entendu? demanda la reine.
--Oui, ma fille, repondit M. Peretti, tout vu, tout Entendu...
XIV
SIXTE-QUINT
--M. le Duc De Guise, continua le pape, rappelle volontiers que, dans ma
premiere jeunesse, j'ai garde des pourceaux. En effet, le maitre chez
qui j'etais domestique me jugeait tellement faible d'esprit qu'il
n'avait meme pas voulu me confier les vaches de son troupeau. On me
donna les pourceaux a conduire a la pature: c'est la, ma fille, que j'ai
appris a conduire les hommes... Devenu pretre, devenu cardinal, plus je
montais, plus je m'apercevais que les hommes sont des pourceaux, qu'il
faut mener a coups de gaule. C'est ainsi que je suis devenu pape, ma
fille!...
Il se mit a rire doucement.
--Savez-vous comment m'appelaient les cardinaux du conclave?... Ils
m'appelaient l'Ane!... Oui, ma fille, l'Ane de la Marche. Et c'est pour
cela qu'ils m'ont elu... Et puis, ils croyaient que j'allais mourir,
tellement j'etais courbe, penche vers la terre... Jugez de leur terreur
lorsque je me redressai tout a coup, une fois elu!... Votre Guise est
pleutre, madame. Votre Guise est un pourceau, madame!
Sixte se mit a rire doucement, mais, si doux que fut ce rire, il etait
formidable. Catherine, malgre elle, frissonna. Le pape, tout a coup, se
tourna vers elle:
--Votre fils Henri, madame, est un p
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