bout pres de la
porte, Marie-Louise et Philippe-Auguste, tous deux en chemise, qui
regardaient curieusement. Alors, oubliant son chagrin de commande, elle
se precipita sur eux, la main levee, en criant d'une voix
rageuse:--"Voulez-vous bien filer, bougres de polissons!"
Etant remontee dix minutes plus tard avec une fournee d'autres voisines,
apres avoir de nouveau secoue le buis sur sa belle-mere, prie, larmoye,
accompli tous ses devoirs, elle retrouva ses deux enfants revenus
ensemble derriere elle. Elle les talocha encore par conscience; mais, la
fois suivante, elle n'y prit plus garde; et, a chaque retour de
visiteurs, les deux mioches suivaient toujours, s'agenouillant aussi
dans un coin et repetant invariablement tout ce qu'ils voyaient faire a
leur mere.
Au commencement de l'apres-midi, la foule des curieuses diminua. Bientot
il ne vint plus personne. Mme Caravan, rentree chez elle, s'occupait a
tout preparer pour la ceremonie funebre; et la morte resta solitaire.
La fenetre de la chambre etait ouverte. Une chaleur torride entrait avec
des bouffees de poussiere; les flammes des quatre bougies s'agitaient
aupres du corps immobile; et sur le drap, sur la face aux yeux fermes,
sur les deux mains allongees, des petites mouches grimpaient, allaient,
venaient, se promenaient sans cesse, visitaient la vieille, attendant
leur heure prochaine.
Mais Marie-Louise et Philippe-Auguste etaient repartis vagabonder dans
l'avenue. Ils furent bientot entoures de camarades, de petites filles
surtout, plus eveillees, flairant plus vite tous les mysteres de la vie.
Et elles interrogeaient comme les grandes personnes.--"Ta grand'maman
est morte?"--"Oui, hier au soir."--"Comment c'est, un mort?"--Et
Marie-Louise expliquait, racontait les bougies, le buis, la figure.
Alors une grande curiosite s'eveilla chez tous les enfants; et ils
demanderent aussi a monter chez la trepassee.
Aussitot, Marie-Louise organisa un premier voyage, cinq filles et deux
garcons: les plus grands, les plus hardis. Elle les forca a retirer
leurs souliers pour ne point etre decouverts; la troupe se faufila dans
la maison et monta lestement comme une armee de souris.
Une fois dans la chambre, la fillette, imitant sa mere, regla le
ceremonial. Elle guida solennellement ses camarades, s'agenouilla, fit
le signe de la croix, remua les levres, se releva, aspergea le lit, et
pendant que les enfants, en un tas serre, s'approchaient, effrayes,
curieux et ravi
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