algre une majorite parlementaire hostile au gouvernement, ce
dernier ne se maintint pas comme si de rien n'etait? Par consequent, les
gouvernants ne s'inquietent guere d'avoir pour eux la majorite ou la
minorite. Ils disposent de la force brutale et ils ne se generont
nullement, le cas echeant, pour supprimer violemment les majorites
parlementaires et rester les maitres. Les minorites ont toujours ete,
dans l'histoire, une "force motrice" en quelque sorte, et si nous
devions attendre jusqu'a ce que nous soyons arrives de 20 a 60 ou 80 p.
c., nous aurions le temps.
Bebel envisage les choses autrement. Il est vrai qu'il met en garde
contre les provocations et demontre que, dans ce temps de fusils a
repetition et de canons perfectionnes, une revolution, entreprise par
quelques centaines de mille individus, serait indubitablement ecrasee.
Neanmoins, il dit avoir beaucoup d'espoir dans un avenir tres proche. Il
s'exprime ainsi: "Je crois que nous n'avons qu'a nous feliciter de la
marche des choses. Ceux-la seuls qui ne sont pas a meme d'envisager
l'ensemble des evenements, pourront ne pas accueillir cette
appreciation. La societe bourgeoise travaille avec tant d'acharnement a
sa propre destruction qu'il ne nous reste qu'a attendre tranquillement
pour nous emparer du pouvoir qu'il lui echappe. Dans toute l'Europe,
comme en Allemagne, les choses prennent une tournure dont nous n'avons
qu'a nous rejouir. Je dirai meme que la realisation complete de notre
but final est tellement proche qu'il y a peu de personnes dans cette
salle qui n'en verront pas l'avenement".
Bebel s'attend donc a un prompt changement de l'etat des choses au
profit de nos idees, ce qui ne l'empeche pourtant nullement de parler de
"l'insanite d'une revolution commencee par quelques centaines de mille
individus". Comment concilier ces deux raisonnements?
En tout cas, il est beaucoup plus optimiste que Liebknecht et Vollmar,
et il caresse de telles illusions qu'il se dit a cote d'Engels--quant
aux predictions de ce dernier qui fixe la date de la revolution en
1898--le seul "Jeune" dans le parti. Reste a savoir si cet optimisme ne
va pas trop loin lorsqu'on ecrit, comme Engels: "Aux elections de 1895
nous pourrons au moins compter sur 2,500,000 voix; vers 1900 le nombre
de nos electeurs aura atteint 3,500,000 a 4,000,000, ce qui terminera ce
siecle d'une facon fort agreable aux bourgeois[2]". Quant a nous, nous
ne pouvons provisoirement partager ces esperan
|