Bebel est tres
faible, cela saute aux yeux de tous ceux qui, attentivement, et sans
parti pris, relisent les discussions publiees dans le compte-rendu du
Congres. Si Bebel et Liebknecht disent vrai quand ils pretendent qu'ils
preferent etre du cote des ultra-revolutionnaires que du cote des
endormeurs, alors nous ne comprenons pas pourquoi la proposition d'agir
energiquement et la franche et ouverte critique de l'attitude de la
fraction aient ete accueillies avec tant de deplaisir. Point de fumee
sans feu. S'il y a une opposition, c'est qu'il existe une raison pour
cela, et, au lieu de la rechercher, l'on se demene comme un diable dans
un benitier pour donner le change, pour faire croire qu'une opposition
quelconque n'a aucune raison d'etre, et que celle-ci n'existe que pour
faire de l'obstruction quand meme! La pretention de Liebknecht donne
pour preuve de l'efficacite de la direction le succes si
merveilleusement affirme. Ceci cree un antecedent tellement dangereux,
que l'on ne peut pas trop energiquement protester contre une pareille
conception. L'aventurier Napoleon III ne choisit-il pas pour devise: "Le
succes justifie tout?" En d'autres termes: l'adoration du succes est le
comble de l'impudence, chez Napoleon III comme chez Liebknecht.
Cependant les esperances de Liebknecht et celles de Bebel, concernant
les evenements prochains, different de beaucoup entre elles. Lorsque
Liebknecht dit: "Nous formons tout au plus 20 p. c. de la population et
80 p. c. sont contre nous", il suppose evidemment qu'il faudra encore
beaucoup de temps aux democrates-socialistes avant de former la
majorite. Vollmar ajoute: "Il serait ridicule de notre part d'exiger, et
comme democrates nous n'en avons meme pas le droit, que ces 80 p. c. se
soumettent a nous. Tout ce que nous pouvons faire, c'est attirer
graduellement a nous ces 80 p. c.". Ceux-ci veulent donc suivre la voie
legale et pacifique pour obtenir la majorite. Mais y aurait-il un
individu assez naif, disons le mot, assez ignorant, pour croire que le
jour ou nous aurions la majorite de notre cote, la bourgeoisie cederait
et abdiquerait ses prerogatives? La force se trouve entre les mains des
autorites etablies et, comme le disait le philosophe Spinoza: "Chacun a
juste autant de droit qu'il a de pouvoir". Est-ce que Bismarck n'a pas
gouverne pendant un certain temps sans budget et sans majorite dans le
Parlement de l'Allemagne du Nord? Est-ce qu'en Danemark, pendant des
annees, m
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