la mer, entrainants comme la vague,
eclatants comme la tempete. Et puis, elle avait des levres rouges, des
framboises parfumees qui riaient sur ses dents aigues. Et puis, elle
avait un sein provocant, qui donnait a sa desinvolture je ne sais quoi
de batailleur et de va-de-l'avant.
Quand il voyait ce sein, il tombait agenouille et demandait a Angele la
grace d'y cueillir des fraises, expression que j'abandonne aux lettres
de l'avenir.
Si toutes celles qui ne sont ni belles ni jolies n'etaient pas aimees,
ce serait un desastre sur la terre, qui ne vit que par l'amour.
Mais de qui parlons-nous?
J'oubliais. Nous parlons de monsieur et de madame Falbert, deux jeunes
maries qui filent les derniers jours de leur lune de miel.
Je ne dresserai pas l'arbre genealogique des Falbert, non plus que celui
des Aymar, quoique tout le monde descende d'Adam et Eve, c'est-a-dire
que les hommes sont toujours plus ou moins trompes par les femmes. Voila
la vraie noblesse hereditaire, puisque c'est la noblesse des passions.
Leonce Falbert, licencie en droit, s'etait marie a la veille de
plaider sa premiere cause. S'il s'etait marie, ce n'etait pas dans
la preoccupation d'avoir beaucoup d'enfants, mais parce qu'il avait
rencontre dans une petite fete mondaine Mlle d'Aymar, qui prenait tous
les coeurs au cotillon. Il n'y fit pas trop le chevalier de la triste
figure. Il soupa a cote d'elle, il la cajola par toutes les caresses
de la causerie et des oeillades, si bien que Mme Agnes dit a sa fille,
quelques jours apres:
--Sais-tu pourquoi tu es distraite? C'est parce que tu penses a M.
Leonce Falbert.
--Pas du tout, maman.
--Alors, s'il demandait ta main, tu lui dirais de repasser?
--Non, je lui dirais oui;
--Et pourquoi epouserais-tu plutot qu'un autre M. Leonce Falbert?
--Par curiosite.
--Ah! je te reconnais bien la; tout ce que tu fais et tout ce que tu
feras, curiosite, curiosite, curiosite!
--Mais, maman, un roman que j'ai lu malgre toi m'a dit l'autre jour
qu'il fallait lire toutes les pages du livre de la vie.
--Ce roman, ma chere Angele, ne parle pas comme un livre, mais comme un
roman; car il est dit aussi que, si la vie n'etait pas un mauvais livre,
on ne s'y amuserait pas. J'espere que tu ne prends pas au serieux toutes
ces betises-la?
Mlle Angele ne repondit pas, mais elle pensa que, si sa mere pensait
ainsi, c'est qu'elle etait revenue de ces "betises-la".
Si Mme d'Aymar avait parle a sa fille d
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