service que vous offrez de nous rendre, comte?
demanda Anne d'Autriche apres un instant de silence.
-- Oui, Madame, encore un service, dit Athos, choque de ce que la
reine ne paraissait point le reconnaitre.
C'etait un grand coeur qu'Athos, et par consequent un bien pauvre
courtisan.
Anne fronca le sourcil. Mazarin, qui, assis devant une table,
feuilletait des papiers comme eut pu le faire un simple secretaire
Etat, leva la tete.
-- Parlez, dit la reine.
Mazarin se remit a feuilleter ses papiers.
-- Madame, reprit Athos, deux de nos amis, deux des plus
intrepides serviteurs de Votre Majeste, M. d'Artagnan et M. du
Vallon, envoyes en Angleterre par M. le cardinal, ont disparu tout
a coup au moment ou ils mettaient le pied sur la terre de France,
et l'on ne sait ce qu'ils sont devenus.
-- Eh bien? dit la reine.
-- Eh bien! dit Athos, je m'adresse a la bienveillance de Votre
Majeste pour savoir ce que sont devenus ces deux gentilshommes, me
reservant, s'il le faut ensuite, de m'adresser a sa justice.
-- Monsieur, repondit Anne d'Autriche avec cette hauteur qui, vis-
a-vis de certains hommes, devenait de l'impertinence, voila donc
pourquoi vous nous troublez au milieu des grandes preoccupations
qui nous agitent? Une affaire de police! Eh! monsieur, vous savez
bien, ou vous devez bien le savoir, que nous n'avons plus de
police depuis que nous ne sommes plus a Paris.
-- Je crois que Votre Majeste, dit Athos en s'inclinant avec un
froid respect, n'aurait pas besoin de s'informer a la police pour
savoir ce que sont devenus MM. d'Artagnan et du Vallon; et que si
elle voulait bien interroger M. le cardinal a l'endroit de ces
deux gentilshommes, M. le cardinal pourrait lui repondre sans
interroger autre chose que ses propres souvenirs.
-- Mais, Dieu me pardonne! dit Anne d'Autriche avec ce dedaigneux
mouvement des levres qui lui etait particulier, je crois que vous
interrogez vous-meme.
-- Oui, Madame, et j'en ai presque le droit, car il s'agit de
M. d'Artagnan, de M. d'Artagnan, entendez-vous bien, Madame? dit-
il de maniere a courber sous les souvenirs de la femme le front de
la reine.
Mazarin comprit qu'il etait temps de venir au secours d'Anne
d'Autriche.
-- _Monsou_ le comte, dit-il, je veux bien vous apprendre une
chose qu'ignore Sa Majeste, c'est ce que sont devenus ces deux
gentilshommes. Ils ont desobei, et ils sont aux arrets.
-- Je supplie donc Votre Majeste, dit Athos toujours impas
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