a trois comme celui-ci. Nous ne voulons pas exposer Votre
Eminence aux hasards de la guerre.
-- Allons, dit Mazarin, je vois qu'il faudra capituler.
-- Avant le siege?
-- Oui, les conditions seront peut-etre meilleures.
-- Ah! Monseigneur, pour ce qui est des conditions, vous verrez
comme nous sommes raisonnables.
-- Voyons, quelles sont-elles, vos conditions?
-- Reposez-vous d'abord, Monseigneur, et nous, nous allons
reflechir.
-- Je n'ai pas besoin de repos, messieurs, j'ai besoin de savoir
si je suis entre des mains amies ou ennemies.
-- Amies, Monseigneur. Amies!
-- Eh bien, alors, dites-moi tout de suite ce que vous voulez,
afin que je voie si un arrangement est possible entre nous.
Parlez, monsieur le comte de La Fere.
-- Monseigneur, dit Athos, je n'ai rien a demander pour moi et
j'aurais trop a demander pour la France. Je me recuse donc et
passe la parole a M. le chevalier d'Herblay.
Athos, s'inclinant, fit un pas en arriere et demeura debout,
appuye contre la cheminee, en simple spectateur de la conference.
-- Parlez donc, monsieur le chevalier d'Herblay, dit le cardinal.
Que desirez-vous? Pas d'ambages, pas d'ambiguites. Soyez clair,
court et precis.
-- Moi, Monseigneur, je jouerai cartes sur table.
-- Abattez donc votre jeu.
-- J'ai dans ma poche, dit Aramis, le programme des conditions
qu'est venue vous imposer avant-hier a Saint-Germain la deputation
dont je faisais partie. Respectons d'abord les droits anciens; les
demandes qui seront portees au programme seront accordees.
Nous etions presque d'accord sur celles-la, dit Mazarin, passons
donc aux conditions particulieres.
-- Vous croyez donc qu'il y en aura? dit en souriant Aramis.
-- Je crois que vous n'aurez pas tous le meme desinteressement que
M. le comte de La Fere, dit Mazarin en se retournant vers Athos en
le saluant.
-- Ah? Monseigneur, vous avez raison, dit Aramis, et je suis
heureux de voir que vous rendez enfin justice au comte. M. de La
Fere est un esprit superieur qui plane au-dessus des desirs
vulgaires et des passions humaines; c'est une ame antique et
fiere. M. le comte est un homme a part. Vous avez raison,
Monseigneur, nous ne le valons pas, et nous sommes les premiers a
le confesser avec vous.
-- Aramis, dit Athos, raillez-vous?
-- Non, mon cher comte, non, je dis ce que nous pensons et ce que
pensent tous ceux qui vous connaissent. Mais vous avez raison, ce
n'est pas de vous qu'il s'agit
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