, qu'au milieu de ces grandes preoccupations le general
Cromwell ait eu le temps de penser...
-- Cromwell pense a tout, Cromwell a du temps pour tout; et,
croyez-moi, cher ami, ne perdons pas le notre, il est precieux.
Nous ne serons en surete qu'apres avoir vu Mazarin, et encore...
-- Diable! dit Porthos, et que lui dirons-nous a Mazarin?
-- Laissez-moi faire, j'ai mon plan; rira bien qui rira le
dernier. M. Cromwell est bien fort; M. Mazarin est bien ruse, mais
j'aime encore mieux faire de la diplomatie contre eux que contre
feu M. Mordaunt.
-- Tiens! dit Porthos, c'est agreable de dire _feu monsieur
Mordaunt._
-- Ma foi, oui! dit d'Artagnan; mais en route!
Et tous deux, sans perdre un instant, se dirigerent a vue de pays
vers la route de Paris, suivis de Mousqueton, qui, apres avoir eu
trop froid toute la nuit, avait deja trop chaud au bout d'un quart
d'heure.
LXXX. Retour
Athos et Aramis avaient pris l'itineraire que leur avait indique
d'Artagnan et avaient chemine aussi vite qu'ils avaient pu. Il
leur semblait qu'il serait plus avantageux pour eux d'etre arretes
pres de Paris que loin.
Tous les soirs, dans la crainte d'etre arretes pendant la nuit,
ils tracaient soit sur la muraille, soit sur les vitres, le signe
de reconnaissance convenu; mais tous les matins ils se
reveillaient libres, a leur grand etonnement.
A mesure qu'ils avancaient vers Paris, les grands evenements
auxquels ils avaient assiste et qui venaient de bouleverser
l'Angleterre s'evanouissaient comme des songes; tandis qu'au
contraire ceux qui pendant leur absence avaient remue Paris et la
province venaient au-devant d'eux.
Pendant ces six semaines d'absence, il s'etait passe en France
tant de petites choses qu'elles avaient presque compose un grand
evenement. Les Parisiens, en se reveillant le matin sans reine,
sans roi, furent fort tourmentes de cet abandon; et l'absence de
Mazarin, si vivement desiree, ne compensa point celle des deux
augustes fugitifs.
Le premier sentiment qui remua Paris lorsqu'il apprit la fuite a
Saint-Germain, fuite a laquelle nous avons fait assister nos
lecteurs, fut donc cette espece d'effroi qui saisit les enfants
lorsqu'ils se reveillent dans la nuit ou dans la solitude. Le
parlement s'emut, et il fut decide qu'une deputation irait trouver
la reine, pour la prier de ne pas plus longtemps priver Paris de
sa royale presence.
Mais la reine etait encore sous la double impression du triomph
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