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ou peu s'en faut. -- Mon ami, je me fais vieux, dit Aramis; le bruit et le mouvement de la ville ne me vont plus. "A cinquante-sept ans, on doit chercher le calme et la meditation. Je les ai trouves ici. Quoi de plus beau et de plus severe a la fois que cette vieille Armorique? Je trouve ici, cher d'Artagnan, tout le contraire de ce que j'aimais autrefois, et c'est ce qu'il faut a la fin de la vie, qui est le contraire du commencement. Un peu de mon plaisir d'autrefois vient encore m'y saluer de temps en temps sans me distraire de mon salut. Je suis encore de ce monde, et cependant, a chaque pas que je fais, je me rapproche de Dieu. -- Eloquent, sage, discret, vous etes un prelat accompli, Aramis, et je vous felicite. -- Mais, dit Aramis en souriant, vous n'etes pas seulement venu, cher ami, pour me faire des compliments... Parlez, qui vous amene? Serais-je assez heureux pour que, d'une facon quelconque, vous eussiez besoin de moi? -- Dieu merci, non, mon cher ami, dit d'Artagnan, ce n'est rien de cela. Je suis riche et libre. -- Riche? -- Oui, riche pour moi; pas pour vous ni pour Porthos, bien entendu. J'ai une quinzaine de mille livres de rente. Aramis le regarda soupconneux. Il ne pouvait croire, surtout en voyant son ancien ami avec cet humble aspect, qu'il eut fait une si belle fortune. Alors d'Artagnan, voyant que l'heure des explications etait venue, raconta son histoire d'Angleterre. Pendant le recit, il vit dix fois briller les yeux et tressaillir les doigts effiles du prelat. Quant a Porthos, ce n'etait pas de l'admiration qu'il manifestait pour d'Artagnan, c'etait de l'enthousiasme, c'etait du delire. Lorsque d'Artagnan eut acheve son recit: -- Eh bien? fit Aramis. -- Eh bien! dit d'Artagnan, vous voyez que j'ai en Angleterre des amis et des proprietes, en France un tresor. Si le coeur vous en dit, je vous les offre. Voila pourquoi je suis venu. Si assure que fut son regard, il ne put soutenir en ce moment le regard d'Aramis. Il laissa donc devier son oeil sur Porthos, comme fait l'epee qui cede a une pression toute-puissante et cherche un autre chemin. -- En tout cas, dit l'eveque, vous avez pris un singulier costume de voyage, cher ami. -- Affreux! je le sais. Vous comprenez que je ne voulais voyager ni en cavalier ni en seigneur. Depuis que je suis riche, je suis avare. -- Et vous dites donc que vous etes venu a Belle-Ile? fit Aramis sans transition. -- Oui, rep
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