meme de Monsieur, frere du roi, et cela
suffisait a Malicorne.
Seulement, au chapitre des charges, Mlle de Montalais coutait par
an: rubans, gants et sucreries, mille livres. De Manicamp coutait,
argent prete jamais rendu, de douze a quinze cents livres par an.
Il ne restait donc rien a Malicorne.
Ah! si fait, nous nous trompons, il lui restait la caisse
paternelle. Il usa d'un procede sur lequel il garda le plus
profond secret, et qui consistait a s'avancer a lui-meme, sur la
caisse du syndic, une demi-douzaine d'annees, c'est-a-dire une
quinzaine de mille livres, se jurant bien entendu, a lui-meme, de
combler ce deficit aussitot que l'occasion s'en presenterait.
L'occasion devait etre la concession d'une belle charge dans la
maison de Monsieur, quand on monterait cette maison a l'epoque de
son mariage.
Cette epoque etait venue, et l'on allait enfin monter la maison.
Une bonne charge chez un prince du sang, lorsqu'elle est donnee
par le credit et sur la recommandation d'un ami tel que le comte
de Guiche, c'est au moins douze mille livres par an, et, moyennant
cette habitude qu'avait prise Malicorne de faire fructifier ses
revenus, douze mille livres pouvaient s'elever a vingt.
Alors, une fois titulaire de cette charge, Malicorne epouserait
Mlle de Montalais; Mlle de Montalais, d'une famille ou le ventre
anoblissait, non seulement serait dotee, mais encore ennoblissait
Malicorne. Mais, pour que Mlle de Montalais, qui n'avait pas
grande fortune patrimoniale, quoiqu'elle fut fille unique, fut
convenablement dotee, il fallait qu'elle appartint a quelque
grande princesse, aussi prodigue que Madame douairiere etait
avare. Et afin que la femme ne fut point d'un cote pendant que le
mari serait de l'autre, situation qui presente de graves
inconvenients, surtout avec des caracteres comme etaient ceux des
futurs conjoints, Malicorne avait imagine de mettre le point
central de reunion dans la maison meme de Monsieur, frere du roi.
Mlle de Montalais serait fille d'honneur de Madame. M. Malicorne
serait officier de Monsieur. On voit que le plan venait d'une
bonne tete, on voit aussi qu'il avait ete bravement execute.
Malicorne avait demande a Manicamp de demander au comte de Guiche
un brevet de fille d'honneur.
Et le comte de Guiche avait demande ce brevet a Monsieur, lequel
l'avait signe sans hesitation.
Le plan moral de Malicorne, car on pense bien que les combinaisons
d'un esprit aussi actif que le sien ne
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