au. Quand elles eurent disparu, je regagnai la
modeste demeure de monsieur et madame Volabu, un peu preoccupe de ma
petite aventure.
Je trouvai mon souper pret. J'aurais ete Grandgousier en personne,
qu'on ne m'eut pas traite plus largement. Je crois que toute la petite
basse-cour de madame Volabu y avait passe. Je n'aurais pas eu bonne
grace a me plaindre de cette prodigalite, en voyant l'air de triomphe
naif avec lequel ces braves gens me faisaient les honneurs de chez eux.
J'exigeai qu'ils se missent a table avec moi, ainsi que la vieille mere
de madame Volabu, qui etait encore un robuste virago, nommee madame
Peirecote, et qui paraissait prendre a coeur d'etre bonne gardienne de
l'honneur de son gendre.
Il me fallut soutenir un rude assaut pour me preserver d'une
indigestion, car mon brave _vetturino_ semblait decide a me faire
etouffer. Des que je pus obtenir quelques instants de repit, j'en
profitai pour faire des questions sur le chateau et ses habitants.
--C'est bien vieux, ce chateau, me dit Volabu d'un air capable; c'est
laid, n'est-ce pas? Ca ressemble a une grande masure? Mais c'est plus
joli en dedans qu'on ne croirait; c'est tres-bien tenu, bien conserve,
bien arrange, quoique en vieux meubles qui ne sont plus de mode. Il y a
des caloriferes, ma foi! C'est que le vieux marquis ne se refusait rien.
Il n'etait pas tres-genereux pour les autres, mais il aimait bien ses
aises, et il passait presque toute l'annee ici. L'hiver, il n'allait
qu'un peu a Paris, en Italie jamais, et pourtant c'etait son pays.
--Et qui possede ce chateau a present?
--Son frere, la comte de Balma, qui vient de passer marquis par le deces
de l'aine de la famille. Dame, il n'est pas jeune non plus! C'est le
sort de notre village, on dirait, d'avoir sous les yeux vieille maison
et vieilles gens.
--Bah! la jeunesse ne manque pas encore dans le chateau, dit madame
Volabu; M. le nouveau marquis n'a-t-il pas cinq enfants, dont le plus
age ne l'est guere plus que monsieur? En parlant ainsi, madame Volabu me
designait a son mari, dont les yeux s'arrondirent tout a coup, en meme
temps que sa bouche s'allongeait en une moue assez risible.
--Oh! s'ecria-t-il, M. de Balma a des garcons a present! Quand je suis
parti, il n'avait qu'une fille, et il n'y a qu'un mois de cela.
--C'est qu'il ne nous disait pas tout apparemment, dit a son tour la
vieille madame Peirecote. Depuis un mois, il lui est arrive une famille
nombreuse, deux aut
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