dans cet actif il entrait de creances sur l'etat. Tout ce qui consistait
ou en lingots ou en lettres de change de commerce etait fort sur; mais
les rentes, les bons de l'echiquier, qui faisaient la plus grande partie
de l'actif, avaient perdu credit avec la politique du gouvernement. Les
billets perdirent sur-le-champ plus de quinze pour cent. Les banquiers
demanderent a leur tour la faculte de payer en billets, sous peine
d'etre obliges de suspendre leurs paiemens. Il etait naturel qu'on leur
accordat la meme faveur qu'a la banque, et il y avait meme justice a le
faire, car c'etait la banque qui, en refusant de remplir ses engagemens
en argent, les mettait dans l'impossibilite d'acquitter les leurs de
cette maniere. Mais des lors on donnait aux billets cours force de
monnaie. Pour eviter cet inconvenient, les principaux commercans de
Londres se reunirent, et donnerent une preuve remarquable d'esprit
public et d'intelligence. Comprenant que le refus d'admettre en paiement
les billets de la banque amenerait une catastrophe inevitable, dans
laquelle toutes les fortunes auraient egalement a souffrir, ils
resolurent de la prevenir, et ils convinrent d'un commun accord de
recevoir les billets en paiement. Des cet instant, l'Angleterre entra
dans la voie du papier-monnaie. Il est vrai que ce papier-monnaie, au
lieu d'etre force, etait volontaire; mais il n'avait que la solidite du
papier, et il dependait eminemment de la conduite politique du cabinet.
Pour le rendre plus propre au service de monnaie, on le divisa en
petites sommes. On autorisa la banque dont les moindres billets etaient
de 5 livres sterling (98 ou 100 francs), a en emettre de 20 et 40
schellings (24 et 48 francs). C'etait un moyen de les faire servir au
paiement des ouvriers.
Quoique le bon esprit du commerce anglais eut rendu cette catastrophe
moins funeste qu'elle aurait pu l'etre, cependant la situation n'en
etait pas moins tres perilleuse; et, pour qu'elle ne devint pas tout a
fait desastreuse, il fallait desarmer la France, et empecher que les
escadres espagnole, francaise et hollandaise, ne vinssent allumer un
incendie en Irlande. La famille royale etait toujours aussi ennemie de
la revolution et de la paix; mais Pitt, qui n'avait d'autre vue que
l'interet de l'Angleterre, regardait, dans le moment, un repit comme
indispensable. Que la paix fut ou non definitive, il fallait un instant
de repos. Entierement d'accord sur ce point avec lord Grenville, il
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