s enivree de succes que celle d'Italie. Une armee est
toujours faite a l'image du general. Son esprit passe a ses officiers,
et de ses officiers se communique a ses soldats. L'armee du Rhin etait
modelee sur Moreau. Moreau, flatte par la faction royaliste, qui voulait
mettre sa sage retraite au-dessus des merveilleux exploits d'Italie,
avait moins de haine contre elle que Bonaparte. Il etait d'ailleurs
insouciant, modele, froid, et n'avait pour la politique qu'un gout egal
a sa capacite; aussi se tenait-il en arriere, ne cherchant point a se
prononcer. Cependant il etait republicain, et point traitre comme on l'a
dit. Il avait dans ce moment la preuve de la trahison de Pichegru, et
aurait pu rendre au gouvernement un immense service. Nous avons deja
dit qu'il venait de saisir un fourgon du general Kinglin, renfermant
beaucoup de papiers. Ces papiers contenaient toute la correspondance
chiffree de Pichegru avec Wickam, le prince de Conde, etc. Moreau
pouvait donc fournir la preuve de la trahison, et rendre plus
praticables les moyens judiciaires. Mais Pichegru avait ete son
general en chef et son ami, il ne voulait pas le trahir, et il faisait
travailler au dechiffrement de cette correspondance, sans la declarer
au gouvernement. Du reste, elle renfermait la preuve de la fidelite
de Moreau lui-meme a la republique. Pichegru, apres avoir donne sa
demission, n'avait qu'un moyen de se conserver de l'importance, c'etait
de dire qu'il disposait de Moreau, et que, se reposant sur lui de la
direction de l'armee, il allait conduire les intrigues de l'interieur.
Eh bien! Pichegru ne cessa de dire qu'il ne fallait pas s'adresser a
Moreau, parce qu'il n'accueillerait aucune ouverture[8]. Moreau etait
donc froid, mais fidele. Son armee etait une des plus belles et des plus
braves que jamais la republique eut possedees.
[Note 8: Si M. de Montgaillard avait lu la correspondance de Kinglin,
il n'aurait pas avance, sur la foi d'une parole du roi Louis XVIII, que
Moreau trahissait la France des l'annee 1797.]
Tout etait different a l'armee de Sambre-et-Meuse: c'etait, comme nous
l'avons dit ailleurs, l'armee de Fleurus, de l'Ourthe et de la Roer,
armee brave et republicaine, comme son ancien general. Son ardeur
s'etait encore augmentee lorsque le jeune Hoche, appele a la commander,
etait venu y repandre tout le feu de son ame. Ce jeune homme, devenu en
une campagne, de sergent aux gardes francaises, general en chef, aimait
la republiqu
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