ils restes ensemble?
JULIEN.--Je ne sais pas, maitresse; je ne les ai plus vus quand je me
suis reveille.
BONARD.--C'est egal, mon garcon, ne t'afflige pas; tu n'y as pas mis
de mechancete, tu ne savais pas que ce vin te griserait. Tu as l'air
fatigue; va te coucher.
MADAME BONARD.--Ote tes beaux habits neufs, d'abord. Je vais les serrer
ici a cote."
Julien ota sa redingote, puis son gilet. Il mit les mains sur les
poches.
"Ah! mon Dieu! qu'est-ce qu'il y a donc?... De l'argent!... De l'or!...
D'ou vient ca? Ce n'est pas a moi!... Je n'y comprends rien.
MADAME BONARD.--De l'or! Comment as-tu de l'or dans tes poches?"
Elle et son mari compterent les pieces: il y en avait dix, plus quelques
pieces d'argent. Ils etaient stupefaits.
"Oh! mon Dieu! mon Dieu! s'ecria Julien, on va croire que je les ai
volees! Mais comment tout cet or a-t-il pu venir dans ma poche? Je ne me
souviens de rien que d'avoir dine et puis dormi au theatre.
BONARD.--Ecoute, Julien, M. Georgey n'etait-il pas un peu gris comme
toi?
JULIEN, _avec hesitation_.--Je crois bien que oui, Monsieur... Un
peu, car ses jambes n'etaient pas solides; il marchait un peu de travers
dans la rue. Alcide et Frederic le soutenaient.
BONARD.--C'est peut-etre lui qui t'a mis tout cela lui-meme dans ta
poche.
JULIEN.--Je ne peux pas garder ca, M'sieur. Si c'est lui, bien sur, il
ne savait guere ce qu'il faisait. J'etais pres de lui, il se sera trompe
de poche; il l'aura voulu mettre dans la sienne et il l'a mis dans la
mienne... Oh! M'sieur, laissez-moi lui porter cet argent tout de suite,
qu'il ne croie pas qu'il a ete vole.
BONARD.--Tu le lui reporteras demain, mon ami; il est trop tard
aujourd'hui. Tu le trouveras couche, et, comme il a trop bu, il ne
serait pas facile a eveiller.
JULIEN.--Ce pauvre M. Georgey! Ce n'est pas sa faute. Je me souviens, a
present, qu'Alcide le pressait toujours de boire, et qu'il lui mettait
du vin blanc avec du rouge; et puis il lui a fait boire a la fin du
cidre en bouteilles, qui moussait comme son champagne; c'est ca qui lui
a porte a la tete! Ce pauvre M. Georgey! C'est donc pour cela qu'il me
demandait pardon le long du chemin en revenant; il paressait honteux. Et
moi qui me mefiais d'Alcide et qui allais a la foire pour empecher qu'il
ne fut attrape! Je l'ai laisse enivrer et... voler peut-etre.
MADAME BONARD.--Vole!... Comment?... tu crois que..., qu'Alcide...?
JULIEN, _avec precipitation_.--Non,
|