linge; sa paillasse etait plus
epaisse; tout ce qu'on pouvait imaginer pour adoucir sa position
etait fait. Frederic le voyait avec reconnaissance et plaisir; il en
remerciait ses camarades et ses chefs. L'aumonier venait le voir aussi
souvent que le lui permettaient ses nombreuses occupations; chacune de
ses visites calmait l'agitation du malheureux prisonnier.
Un matin, lendemain de l'arrivee de M. Georgey, la porte du cachot
s'ouvrit, et Frederic vit entrer l'excellent Anglais suivi d'un soldat
qui apportait un panier rempli de provisions. Frederic ne put retenir un
cri de joie; il s'elanca vers M. Georgey, et, par un mouvement machinal,
irreflechi, il se jeta dans ses bras et le serra contre son coeur.
M. GEORGEY.--Povre Fridric! J'etais si chagrine, si fache! Je savais
rien hier. Je savais tout le soir; le colonel avait tout raconte a moi.
Je avais apporte un consolation pour l'estomac; et le scelerate Alcide
avoir rien du tout, pas une piece."
Frederic, trop emu pour parler, lui serrait les mains, le regardait avec
des yeux humides et reconnaissants.
M. Georgey profita du silence de Frederic pour exhaler son indignation
contre Alcide, son espoir de le voir _fusille en pieces_.
"Je apportais a vous des nouvelles excellentes de Mme Bonarde, de M.
Bonarde, de petite Juliene."
Frederic tressaillit et palit visiblement. M. Georgey, qui l'observait,
rentra sa main dans sa poche; il avait apporte des lettres du pere et de
la mere. M. Georgey savait ce qu'elles contenaient; Bonard remerciait
son fils d'avoir honore son nom; il racontait les propos des gens du
pays, les compliments qu'on lui adressait, son bonheur en apprenant que
son fils avait ete mis deux fois a l'ordre du jour; et d'autres choses
de ce genre qui eussent ete autant de coups de poignard pour le
malheureux Frederic. La lettre de Mme Bonard, beaucoup plus tendre,
etait pourtant dans les memes sentiments d'orgueil maternel.
"Si le povre infortune etait justifie, se dit M. Georgey, je remettrai
apres. Si la condamnation se faisait, je brulerai."
Ils resterent quelques instants sans parler, Frederic cherchait a
contenir son emotion et a dissimuler sa honte; M. Georgey cherchait les
moyens de le faire penser a autre chose. Enfin, il trouva.
"J'avais vu le colonel; il m'avait dit c'etait pas grand'chose pour toi.
Le marechal des logis dira c'etait rien, c'etait lui qui avait pousse;
toi avais pousse Alcide seulement; toi etais excellente creat
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