des logis
sortait.
"Qu'on porte a manger a ces hommes. Du pain et de l'eau a celui-ci. Du
pain et de la soupe a Bonard", dit le marechal des logis au soldat qui
l'accompagnait.
Il ajouta: "Quel gueux que ce Bourel!"
Dans la journee, le colonel voulut aller lui-meme avec le lieutenant
voir et interroger Frederic. Ils le trouverent assis sur son lit et
pleurant.
Le colonel, emu, s'approcha. Frederic releva la tete, et, en
reconnaissant son colonel, il se leva promptement.
FREDERIC.--Oh! mon colonel, quelle bonte!
LE COLONEL.--J'ai voulu t'interroger moi-meme, mon pauvre garcon, pour
pouvoir comprendre comment un bon et brave soldat comme toi a pu se
mettre dans la triste position ou je te trouve. Le marechal des logis
m'a raconte ce qui s'est passe pendant sa visite de ce matin. Sois sur
que si nous pouvons te tirer de la, nous en serons tous tres heureux.
Explique-moi comment, apres ma recommandation et ta promesse, tu t'es
encore reuni a ces mauvais sujets, et comment tu as partage leur
ivresse."
Frederic lui raconta en detail ce qui s'etait passe entre lui et ses
camarades, et comment il avait perdu la tete a la fin de l'orgie, au
point de n'avoir conserve aucun souvenir de la scene avec le marechal
des logis.
LE COLONEL.--C'est facheux, tres facheux! Je ne puis rien te promettre;
mais tes antecedents te vaudront l'indulgence du conseil, et tu peux
compter sur moi pour le jugement le plus favorable.
FREDERIC.--Que Dieu vous benisse, mon colonel. Au lieu de reproches, et
de paroles severes, je recois de vous des paroles d'encouragement et
d'indulgence. Oui, que le bon Dieu vous benisse, vous et les votres, et
qu'il ne vous fasse jamais eprouver les terreurs de la mort deshonorante
dont je suis menace par ma faute."
Le colonel, emu, tendit la main a Frederic, qui la baisa avec effusion.
La porte du cachot se referma, et il se retrouva seul, livre a ses
reflexions.
Quand on vint le soir lui apporter son diner, il demanda au soldat s'il
pouvait recevoir la visite de l'aumonier de la garnison.
"J'en parlerai au marechal des logis, qui t'aura la permission, bien
sur. Jamais on ne refuse a ceux qui la demandent", repondit le soldat.
Le soir meme, en effet, l'aumonier vint visiter le pauvre prisonnier; ce
fut une grande consolation pour Frederic, qui lui ouvrit son coeur en
lui racontant ses torts passes, sa position vis-a-vis de son pere, etc.
Il lui decouvrit, sans rien dissimuler, son desespo
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