ello, avec ses
gros baisers, son air simple, son sourire de jeune fille, ses caresses,
son grand gilet, son regard doux... Oh! quand serai-je ici seule au monde
avec toi? Tu m'enfermeras dans ta chambre et tu emporteras la clef quand
tu sortiras, afin que je ne voie, que je n'entende rien que toi, et tu...
"Etre heureuse un an et mourir. Je ne demande que cela a Dieu et a toi.
Bonsoir, _mio Piero_, mon bon cher ami, je ne pense plus a mes chagrins
quand je parle avec toi. Pourtant mentir toujours est bien triste. Cette
dissimulation m'est odieuse. Cet amour si mal paye, si deplorable, qui
agonise entre moi et Alfred, sans pouvoir recommencer ni finir, est un
supplice. Il est la devant moi comme un mauvais presage pour l'avenir et
semble me dire, a tout instant: "Voila ce que devient l'amour." Mais non,
mais non, je ne veux pas le croire, je veux esperer, croire en toi seul,
t'aimer en depit de tout et en depit de moi-meme. Je ne le voulais pas. Tu
m'y as forcee. Dieu aussi l'a voulu. Que ma destinee s'accomplisse!"
Tel est l'aveu que nous recueillons sur les levres memes de George Sand,
tels sont les torts qui lui peuvent etre reproches. Ils furent assez
graves pour qu'on n'aille pas en chercher d'imaginaires. Or, Paul de
Musset a jete dans la circulation et livre a la sottise humaine des griefs
ou le ridicule le dispute a l'odieux. Comme le malade parlait et se
plaignait--est-ce plausible?--de l'ignoble spectacle qu'il pensait avoir
eu devant les yeux, _on_--est-ce George Sand ou Pagello?--l'aurait
menace de l'enfermer dans une maison de sante, en tant qu'atteint de
folie. Elle aurait fait cela, l'admirable garde-malade qui n'avait pas
quitte son chevet? Et voila les enormites, les absurdites, les mensonges
que Paul de Musset tente audacieusement d'accrediter! Il va jusqu'a
pretendre que son frere lui aurait dicte un autre recit dont il faut noter
l'invraisemblable, l'extravagante teneur:
"Je m'expliquai un soir avec George Sand. Elle nia effrontement ce que
j'avais vu et entendu et me soutint que tout cela etait une invention de
la fievre. Malgre l'assurance dont elle faisait parade, elle craignait
qu'en presence de Pagello il lui devint impossible de nier, et elle voulut
le prevenir, probablement meme lui dicter les reponses qu'il devrait me
faire lorsque je l'interrogerais. Pendant la nuit, je vis de la lumiere
sous la porte qui separait nos deux chambres. Je mis ma robe de chambre et
j'entrai chez George. Un fr
|