enfant souffrant et ne pouvait
se decider a prendre du repos. De temps en temps elle se soulevait sur un
coude et se penchait sur le lit du petit malade pour ecouter sa
respiration. L'enfant ne se plaignait pas; son souffle etait egal et pur,
et la mere allait peut-etre fermer les yeux, lorsqu'elle entendit tout a
coup un grognement, qui fut suivi d'un bruit sourd contre la porte
exterieure de la maison.
--Maudit chien! murmura-t-elle. Il va reveiller mon petit Jean.
Des hurlements aigus se melaient deja a la basse ronflante du dogue en
mauvaise humeur. Il y avait dans la voix de l'animal de la colere et de
l'inquietude. Encore quelques minutes, et il etait facile de deviner qu'il
allait jeter bruyamment le cri d'alarme.
La mere n'hesita pas; elle sauta a bas du lit, ouvrit doucement la fenetre
et appela le trop zele defenseur a quatre pattes.
--Ici, Pitt! ici! dit la femme du garde en allongeant la main pour caresser
le dogue.
Le chien reconnut la voix de sa maitresse et s'approcha. C'etait un de ces
terriers ennemis implacables des rats, et qui ne se font pardonner leur
physionomie desagreable que pour les services qu'ils rendent dans les
menages. Il avait appartenu autrefois au fameux corsaire Thurot, qui
l'avait trouve a bord d'un navire anglais auquel il avait donne la chasse.
En changeant de maitre, il avait change de nom. On l'appelait Pitt, en
haine du ministre anglais qui avait fait le plus de mal a la marine
francaise.
--Paix! monsieur Pitt! paix! repetait la femme de Cabieu en frappant
amicalement sur la tete du chien.
Mais celui-ci, comme son illustre homonyme, ne revait que la guerre. Il
n'etait pas brave cependant, car il s'etait blotti, en tremblant, contre le
bas de la fenetre. Mais, comme les peureux qui se sentent appuyes, il eleva
la voix, allongea le cou dans la direction de la mer et fit entendre un
grognement menacant.
--Il faut pourtant qu'il y ait quelque chose, pensa la mere.
Elle se pencha et regarda dans la nuit. Mais elle ne put rien apercevoir
sur les dunes. A peine distinguait-on, sur ce fond obscur, l'ombre plus
noire des buissons de tamaris agites par le vent. Au-dessus des dunes, une
bande moins sombre laissait deviner le ciel. La femme de Cabieu crut meme
apercevoir une etoile. Puis l'astre se dedoubla. Les deux lumieres
s'ecarterent et se rapprocherent, pour se rejoindre encore.
--Ce ne sont pas des etoiles! se dit la mere avec epouvante. Ce sont des
feux de l'esc
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