e la tenir au courant de tout
ce qu'il ferait pour arriver a une position lucrative et honorable.
Il avait trois lieues a faire a pied, a travers champs, pour aller au
village de Monglas; il mit dans sa poche une miche de pain, des noix et
des pommes; puis il partit tout courant, sans tourner la tete, de peur
de perdre courage en regardant du cote de sa mere, qui l'appelait d'une
voix faible et dolente.
Il marchait d'un bon pas et ne s'arretait point en route: au bout de
trois heures, il fut chez le vieux Cure, qui venait de dire sa messe et
qui, le voyant seul, s'imagina que cet enfant etait envoye en toute hate
pour l'appeler aupres du lit d'un mourant. Comme il n'avait pas ete
averti de la mort du pere de Valentin, il pensa qu'on venait le chercher
pour administrer les derniers sacrements au pere ou a la mere de cet
enfant.
--Qu'est-ce qui est en danger de mort chez toi, mon ami? lui dit-il avec
interet: ton pere et ta mere, mon enfant, ne sont pas tres vieux, et
toi, pauvre petit, tu es bien jeune. Je vais prendre les saintes huiles
et tout ce qu'il faut pour la ceremonie....
--Monsieur le cure, interrompit naivement Valentin, les choses se sont
passees sans vous: mon pauvre pere est mort, il y a cinq jours, et en
voila quatre qu'il est enterre dans notre cimetiere d'Arthonay. Il n'y
avait donc pas lieu de vous deranger, et aussi je ne viens a vous que
pour moi.
--Pour toi? demanda le cure, un peu surpris de cette visite tardive. Je
ne comprends pas, objecta-t-il d'un ton de reproche, qu'on enterre un
bon chretien comme un paien, sans pretre et sans prieres des morts!
--Oh! Monsieur le cure, repartit l'enfant, les prieres n'ont pas manque:
c'est le cure de la commune voisine qui les a dites; mais mon pere
etant decede subitement, le digne homme, vous n'aviez plus rien a voir
la-dedans. Je ne vous sais pas moins de gre de vos bonnes intentions a
notre egard. J'y comptais bien, d'ailleurs, Monsieur le cure, puisque me
voici.
--C'est tres bien, dit le cure en souriant. Il te reste a me dire en
quoi je puis t'etre utile, mon enfant?
--Vous ne devinez pas, Monsieur le cure? repliqua Valentin, en le
regardant d'un air timide et confiant a la fois. Le pere est mort, la
mere n'a plus son pain cuit. C'est raison que j'aille gagner ma vie
ailleurs, et l'idee m'est venue, Monsieur le cure, de vous prier de
me recevoir au presbytere, ou je puis vous rendre nombre de petits
services, ainsi qu'a madame votre gouve
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