il avait pris toutes ses lecons de
lecture. Il ecrivait donc d'une maniere barbare et incorrecte, mais
il avait fini par savoir lire si parfaitement, qu'il lut et relut a
plusieurs reprises tout ce qui restait du Catechisme, ou il apprit les
dogmes fondamentaux de la religion catholique et les premiers principes
de la morale.
Son instruction en geographie ne fut pas poussee au-dela de l'etude
minutieuse de la carte qu'il possedait, et cette etude minutieuse lui
permit de se rendre bien compte de la configuration geographique d'une
province de France, que cette carte lui mettait sous les yeux. Il ne lui
manquait plus que des livres pour faire des progres rapides dans
une science qui se pretait bien a la nature de son esprit exact et
methodique. Un heureux hasard le servit a souhait pour encourager ses
dispositions a la connaissance de la geographie. Un vieux berger, qui
menait paitre ses moutons dans une prairie voisine, entra en rapport
avec lui et le prit en amitie: ce berger lui donna les premieres notions
de l'astronomie, en lui indiquant la place que les etoiles occupaient
dans le ciel selon la saison de l'annee, et Valentin apprit de la sorte
les noms des astres qu'il reconnut bientot, d'apres leur position, avec
autant de certitude que son maitre lui-meme. Il comprit des lors, par
une espece de divination, les rapports qui devaient exister entre la
position des astres au ciel et celle de toutes les regions de la terre,
les unes a l'egard des autres. C'etaient encore des livres qui lui
faisaient defaut pour l'enseignement approfondi de la geographie, de
cette science, qui lui semblait la plus belle et la plus utile de
toutes.
Le vieux berger, qui devint son guide et son ami, lui apprit, en
outre, tout ce qui composait le savoir et l'experience des bergers,
c'est-a-dire les proprietes des herbes et des plantes, la medecine
usuelle de l'homme et des animaux, les signes du temps, les pronostics
des saisons, les epoques de tous les travaux des champs et mille details
secrets de la vie pastorale et agricole. Valentin etait toujours
aussi mal vetu, aussi mal nourri, aussi mal couche; mais il semblait
indifferent a ces privations, parce qu'il s'absorbait dans l'etude et
dans la meditation. Il etait dit, cependant, que sa destinee ne le
condamnait pas a garder les dindons toute sa vie, et il pensait
quelquefois a rejoindre en Lorraine le bon cure de Monglas, qui l'avait
engage a y venir. Il etait toujours aussi misera
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