vait, tout s'animait autour d'elle; qui songeait a la
pauvre delaissee? Aussi se mit-elle a chanter pour appeler a son secours
tout ce qui passait aupres d'elle sans la regarder.
O vent, qui souffles de l'aurore,
N'as-tu pas vu mon bien-aime,
Parmi les fleurs qu'a fait eclore
La nuit au silence embaume?
A-t-il pleure de mon absence?
A-t-il prie pour mon retour?
Rends-moi la joie et l'esperance,
Dis-moi sa peine et son amour.
Gai papillon, legere abeille,
Poursuivez l'ingrat qui me fuit;
La grenade la plus vermeille,
Le jasmin le plus frais, c'est lui!
Il est plus pur que la verveine,
Son front est blanc comme le lis;
La violette a son haleine;
Ses yeux sont bleus comme l'iris.
Cherche-le-moi, bonne hirondelle,
Cherchez-le-moi, petits oiseaux,
Parmi le thym et l'asphodele,
Au fond des bois, au bord des eaux.
Loin de lui je souffre et je pleure,
Je tremble de crainte et d'emoi;
Si vous ne voulez pas que je meure,
O chers amis, rendez-le-moi!
Le vent passa en murmurant; l'abeille partit pour chercher son butin;
l'hirondelle poursuivit les mouches jusqu'au haut des cieux; les
oiseaux, criant et chantant, s'agacerent dans la feuillee; personne ne
s'inquieta de Violette. Elle descendit de l'arbre en soupirant et marcha
tout droit devant elle, se fiant a son coeur pour retrouver Perlino.
VI
LES TROIS RENCONTRES
Il y avait un torrent qui tombait de la montagne; son lit etait a demi
seche; ce fut le chemin que prit Violette. Deja les lauriers-roses
sortaient du fond de l'eau leurs tetes recouvertes de fleurs; la fille
de Cecco s'enfonca dans cette verdure, suivie par les papillons, qui
voltigeaient autour d'elle comme autour d'un lis qu'agite le vent. Elle
marchait plus vite qu'un banni qui rentre au logis; mais la chaleur
etait lourde; vers midi il lui fallut s'arreter.
En approchant d'une flaque d'eau pour y rafraichir ses pieds brulants,
elle apercut une abeille qui se noyait. Violette allongea son petit
pied; la bestiole y monta. Une fois a sec, l'abeille resta quelque
temps immobile comme pour reprendre haleine, puis elle secoua ses ailes
mouillees; puis, passant sur tout son corps ses pattes plus fines
qu'un fil de soie, elle se secha, se lissa et, prenant son vol, vint
bourdonner autour de celle qui lui avait sauve la vie.
"Violette, lui dit-elle, tu n'as pas oblige une ingrate. Je sais ou tu
vas; laisse-moi t'accompagner. Quand je serai
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