r elle mourait pour
le Christ et par le meme supplice. Pour tous les freres qui la
contemplaient, c'etait une joie profonde de voir et d'admirer le courage
de leur soeur; tous se rappelaient le divin martyr du Calvaire, et tous,
benissant le Seigneur, faisaient des voeux pour la delivrance et la
gloire de Blandine; mais les betes, moins feroces que les hommes, ne
voulurent point toucher au corps de la sainte; l'effort des bestiaires
fut impuissant pour les animer. Elles rentrerent en grondant au fond de
la cage. Au grand deplaisir des spectateurs, il fallut detacher Blandine
et la remettre en prison; on la reservait pour une nouvelle fete de
meurtre et de sang.
Attale restait le dernier; c'etait le plus odieux, car c'etait le plus
brave. Suivant toute apparence, c'etait un missionnaire venu d'Orient,
et, apres l'eveque Pontinus, le principal apotre de l'Eglise de Lyon. Le
peuple demanda a grands cris qu'on fit descendre Attale dans l'arene. Il
y parut le front serein, la tete droite, soutenu par sa conscience,
pret au combat, comme un soldat du Christ. On lui fit faire le tour de
l'amphitheatre, pour que la foule put l'insulter a loisir; devant lui un
soldat portait un tableau ou etait ecrit: _Voici Attale, le chretien_.
Malgre les clameurs du peuple, le proconsul ne put livrer ce jour-la le
martyr au supplice; Attale etait un citoyen romain, ce n'etait pas un
esclave comme Blandine; il fallait l'ordre de l'empereur pour le mettre
a mort. Mais on avait ecrit a Rome; la reponse de Marc-Aurele n'etait
pas douteuse. L'empereur philosophe ecrivait un beau livre rempli de
nobles maximes sur la justice et l'humanite; mais un chretien n'avait
pas de droits, ce n'etait pas un homme, c'etait l'ennemi du genre
humain.
Tandis que Blandine attendait en prison qu'une lettre du Cesar lui
permit enfin de mourir, elle n'etait pas inactive. C'etait, disent ses
contemporains, c'etait comme une mere qui rassemble ses enfants et leur
donne de nouveau la vie. A force de priere et d'argent, les fideles se
faisaient ouvrir les prisons, et tous couraient aupres de Blandine pour
la saluer du nom de martyre. Mais son humilite repoussait ce titre
honorable. "Ceux-la seuls sont martyrs, disait-elle, que le Christ a
appeles aupres de lui; la mort qu'ils ont courageusement soufferte
est le sceau de leur gloire; nous ne sommes que de pauvres et humbles
confesseurs."
Puis elle prechait a tous la resignation, le courage, l'union, et,
enfin, repa
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